Contrôler, un peu, sans sanction, c’est mieux !

Contrôler, un peu, sans sanction, c’est mieux !
Revenons rapidement sur l’affaire de l’IME de Moussaron suite à une rencontre récente, organisée par les deux lanceuses d’alerte de ce dossier (dénonciation de maltraitance sur enfants handicapés), Bernadette Collignon et Céline Boussié, toutes deux accompagnées de représentants syndicaux, et l’ARS (Agence Régionale de Santé).

L’article de La Dépêche «Maltraitance à l’IME de Moussaron : les lanceurs d’alerte dénoncent l’impunité de la direction» (ici), rappelle les circonstances et le contexte de cette rencontre ainsi que la nature des questionnements et des échanges entre les deux parties.

Frapper à la porte des autorités de contrôle ?

Si lancer une alerte reste une bataille de long terme aux conséquences ravageuses pour le lanceur, il est bon ton de souligner la responsabilité de ceux qui en support à l’exercice de votre profession, sont chargés d’une part de vous écouter, d’autre part de vérifier vos dires et auxquels cas, outre prendre en temps et en heure les mesures adéquates que tout professionnel est censé attendre de leur part, se sentir à minima concernés par les suites à donner à un dossier où nombres de lignes rouges ont été franchies.

Nous profitons donc de cet événement pour rappeler que les comportements de l’autorité de contrôle de la profession dénoncés par les lanceuses d’alerte est malheureusement chose courante quel que soit le secteur d’activité, et demeure sans doute l’un des éléments essentiels à la solution de la situation des lanceurs d’alerte.

Les autorités de contrôle, efficientes ?

Mieux vaut prévenir que guérir, dit-on habituellement. On n’en demande pas tant, encore que… la pratique de contrôles non planifiés et totalement impromptus serait déjà une bonne façon de prévenir.
A défaut, lorsque les symptômes sont identifiés, ou que l’on est alerté de leur éventuelle existence, la moindre des choses serait de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer une guérison rapide et efficace. Tout ceci semble tellement évident que l’on a tendance à l’oublier : effectuer des contrôles « surprises » pour prévenir, déceler les dysfonctionnements par des contrôles approfondis, y mettre fin par des injonctions, et sanctionner ceux qui ont fauté.
Car au final, les contrôles ne sont nécessaires que s’ils veillent en même temps à la prévention et à l’exemplarité, seule façon de créer une culture de la déontologie et leurs organes utiles que s’ils sont respectés et que leurs décisions permettent d’améliorer les comportements.

De la théorie à la pratique

Dans la vraie vie, nous en sommes très loin.
➡️ Comment veut-on qu’un organe de contrôle qui prévient le futur audité plusieurs mois à l’avance de sa venue soit pris au sérieux, quand il n’informe pas préalablement des informations dont il voudra prendre connaissance ?
➡️ Comment veut-on qu’il soit à la fois respecté et que sa mission permette de changer les comportements quand, même devant l’évidence, il ne prend jamais de sanctions ?
➡️ Comment veut-on que ceux qui sont en charge au sein de l’entreprise de s’assurer du respect des dispositions légales se sentent concernés, quand l’autorité de contrôle dont ils peuvent eux-mêmes dépendre, ne remplit pas ses propres obligations en transmettant à la justice les affaires les plus graves ?

Rappelons-le, l’alerte dans l’IME Moussaron a longtemps été lancée, puis étouffée jusqu’à ce qu’elle réapparaisse au grand jour, reportage à l’appui confirmant l’ensemble des déclarations.
La dernière lanceuse de ce même dossier, la seule reconnue en tant que telle par la justice (ici), elle, n’a pas diffamé. Sans doute, les images l’ont sauvée.
Et ?
Rien.

On aurait pu s’attendre à ce que l’ARS prenne enfin ses entières responsabilités jusqu’à déposer plainte auprès du Procureur Général de la République au regard des faits graves dénoncés par les lanceuses. Il n’en est rien non plus.
« L’ARS nous a répondu qu’ils ne pouvaient pas le faire pour des faits antérieurs » dixit Xavier Guiot, présent au rendez-vous.
L’ARS, aurait-elle donc, elle aussi, manqué à ses devoirs ?
Quoi qu’il en soit, elle a contrôlé à nouveau en avril dernier et assuré aux lanceuses, que la gestion de l’IME s’est améliorée.
Contrôler, un peu, sans sanction, c’est mieux !

Conséquences

Les manquements à la loi et les comportements inappropriés ne diminueront pas, car ceux qui les commettent ne se sentent pas menacés et ceux en mesure d’y mettre fin, ne s’en sentent pas obligés.

Sans des autorités de contrôle dotées de véritables pouvoirs et démontrant surtout une volonté réelle à la fois d’éducation par ses actions de préventions et de sanctions par des décisions rapides et exemplaires, il y a peu de chance que la situation évolue favorablement.
Par nature même, l’entreprise, si elle sait qu’elle n’a pas grand-chose à craindre, privilégiera toujours son intérêt direct et sa renommée à la dénonciation de comportements déviants.
La composition de toutes ces autorités de contrôles d’une part et les pouvoirs d’investigation et de sanction octroyés par le législateur d’autre part, sont les deux axes sur lesquels toute évolution positive doit s’ancrer.

En vérité ne perdons pas de vue qu’avec des autorités de contrôle dignes de ce nom, une multitude d’affaires n’auraient pas même besoin de lanceurs d’alertes, ou en tous les cas pour un temps très limité, ce qui leur permettrait de revenir rapidement à une vie normale et de ne pas subir indéfiniment la peine du juste.

MM.