
Qu’est ce qu’un lanceur d’alerte ? 
Question de multiple fois évoquée sur MetaMorphosis et ailleurs, dont on  pourrait penser que chacun en a plus ou moins une définition et une idée  précise. 
Il a été porté à la connaissance de MetaMorphosis les termes d’une conversation entre un lanceur d’alerte et une personne  bien connue du monde de l’alerte navigant au travers des problématiques des lanceurs. 
Précisons tout de suite, que cette dernière n’est pas elle même un lanceur ce qui explique sans doute en partie les arguments qui sont les siens. 
Cette personne critique vertement MetaMorphosis sur trois points précis, critique qui impose à notre sens une clarification.
La loi Sapin 2
Tout d’abord, il est reproché à MetaMorphosis dans sa définition du lanceur d’alerte, de prendre comme référence la loi Sapin 2.
Il est vrai que le  Parlement Européen et la Commission ont validé un nouveau cadre  protecteur des lanceurs d’alerte qui va bien au-delà de la loi Sapin 2  et apporte de réelles avancées notamment dans la possibilité du choix du  canal d’alerte ce dont MM. s’est fait l’écho à plusieurs reprises. 
A cette heure-ci, ladite directive n’est toujours pas retranscrite dans  le droit français (et l’on peut raisonnablement penser qu’elle le sera  le plus tard possible compte tenu de l’attitude du gouvernement français  dans la négociation de la directive) et donc si des lanceurs veulent faire valoir leurs droits devant les tribunaux français, ils n’ont  d’autre possibilité que de se référer au cadre légal en vigueur et  accessoirement à certaines dispositions de la CEDH sur la question. 
La  situation des lanceurs étant déjà suffisamment difficile, il n’est pas  nécessaire d’aller chercher des complications supplémentaires en  s’appuyant sur une définition non encore applicable dans le droit. On  peut effectivement souhaiter que la définition européenne soit le plus  rapidement possible le cadre sur lequel les lanceurs pourront se baser,  il n’en demeure pas moins, quitte à déplaire à certains, que dans un  État de droit, ce sont les lois en vigueur qui s’appliquent et non pas celles que chaque citoyen souhaiterait se voir appliquer !
Alors oui,  quand MM. fait référence à la définition du lanceur d’alerte, même s’il  n’en est pas totalement satisfait, il s’appuie sur celle qui fait  référence actuellement : à savoir la loi Sapin 2. 
Au-delà de la question de forme, ce genre de débat est d’une inutilité incroyable qui ne vient que polluer un peu plus l’action des lanceurs déjà confrontés à suffisamment de barrières en tout genre pour que ceux prétendant les aider viennent en rajouter. Mais il est vrai que pour le comprendre, il faut être soi même lanceur c’est à dire être confronté à une réalité quotidienne tellement oppressante, qu’il n’y a plus de place pour les grands et les beaux discours inutiles.
La notion du désintérêt
Ensuite, nous avons une  position différente sur la notion de désintérêt. Suite à notre précédent  propos, l’action désintéressée du lanceur fait partie de la définition de la loi Sapin 2 qui est à ce jour la référence sur cette question. 
Notre  interlocuteur, n’a pas pris soin de toute évidence de bien lire la loi.  Son argumentation repose sur le fait que même si le lanceur est honnête  dans sa démarche, il aurait toujours un intérêt personnel à agir. Donc,  selon lui, le lanceur est nécessairement intéressé et ce faisant il serait donc inutile de revendiquer et de se battre pour cette notion de  désintérêt. 
Or, ce n’est pas ce que dit la loi. Elle mentionne que  le lanceur est une personne « qui agit par désintérêt »; le désintérêt  ne porte donc pas sur le lanceur lui même mais sur son action, ce qui  est foncièrement différent ! 
Il est évident que tout lanceur a un intérêt, ne serait-ce que soit mis fin aux faits délictueux dénoncés, ne serait-ce s’il s’engage dans une longue procédure au  bénéfice de l’intérêt général, qu’il n’en supporte pas lui seul les conséquences professionnelles et financières. On ne parle pas ici de  l’intérêt du lanceur et même si nous reconnaissons que la loi Sapin 2  est loin d’être satisfaisante, nous pensons à MM. que cette notion d’une action désintéressée est primordiale. A défaut, c’est la porte ouverte à  la validation morale et juridique de tous ceux qui réalisent un acte  de dénonciation avec pour motivation première et quasiment unique d’en  tirer un intérêt personnel. Sans motivation financière, l’aviseur fiscal  ne réalise pas d’alerte. Sans un intérêt personnel qui lui est propre,  le délateur ne passera pas à « l’action ». La position du lanceur de ce point de vue est totalement différente puisque la motivation première de son action n’est pas de satisfaire un intérêt immédiat, mais bien de mettre fin à des atteintes à l’intérêt général. 
Il est triste que certains ayant la prétention de se poser en référant des lanceurs ne  soient pas en mesure de faire cette différence essentielle, et en  proclamant haut et fort que « tous les lanceurs sont intéressés » ils  nuisent gravement à leur action et portent un trouble dans l’esprit de l’opinion publique. 
Une fois de plus, il faut être effectivement un  lanceur d’alerte pour mesurer cette différence, car au final bien  souvent ni le délateur ni l’aviseur agissant par intérêt personnel ne vont connaître le parcours mortifère des lanceurs. 
La notion de bonne foi
Enfin,  dernier point tout aussi fondamental et qui démontre une fois de plus  une totale méconnaissance de la part de notre interlocuteur du sujet de  l’alerte, la notion de bonne foi. 
La loi Sapin 2 prévoit que  le lanceur d’alerte cette fois-ci et non son action, doit être de bonne  foi. Nous voyons mal d’un point de vue purement éthique comment on peut  s’opposer à cette notion. Il semble en effet évident à partir du moment  où l’on dit agir pour l’intérêt général parce qu’il existerait des  atteintes graves à la loi, ou des actions contraires à la morale, que  l’on puisse agir autrement que de bonne foi. 
Il faut quand même  avoir un drôle de fonctionnement pour prétendre qu’il serait superflu  de demander aux lanceurs qu’ils agissent selon ce critère. Parce qu’à  défaut, cela signifierait que toute alerte même de mauvaise foi, aurait  la même valeur et la même portée juridique que celle réalisée  conformément à ce principe.
Plus encore, et c’est en ce sens que la  position de notre interlocuteur est aberrante, le législateur a souhaité  inscrire cette notion de bonne foi avant tout pour protéger le lanceur  d’alerte ! En effet, compte tenu des cloisonnements des systèmes  d’information dans la plupart des organisations, il peut s’avérer qu’un  lanceur fasse une dénonciation sur la base des informations en sa  possession, persuadé ce faisant qu’il répond à ses obligations  professionnelles et légales. Il agit de bonne foi puisque rappelons-le,  la loi ne demande pas au lanceur de se substituer à la justice mais  juste d’avoir des soupçons raisonnables et documentés pouvant lui  laisser penser que ce qu’il dénonce est un manquement aux lois ou une  atteinte à la morale. Or il peut s’avérer que des informations non  portées à sa connaissance lors de l’alerte viennent infirmer les  soupçons d’origine. Le juge appréciera alors si le lanceur a agi de  bonne foi et si c’est le cas, il sera à l’abri de toutes poursuites ou représailles. Cette notion de bonne foi est donc fondamentale car elle  est avant tout une protection pour le lanceur, et la jeter avec l’eau du  bain comme se le propose notre interlocuteur c’est une nouvelle fois affaiblir le lanceur et l’exposer à des parcours judiciaires interminables. A nouveau, quitte à radoter, il faut être lanceur pour  comprendre l’importance de cette notion puisqu’à MM. dans la longue  expérience qui est la nôtre, nous avons été amenés à croiser ce type de personnage s’affichant haut et fort comme lanceur mais dont les  motivations et la bonne foi suscitent d’innombrables questionnements. 
Un coup de gueule aujourd’hui dans MM. parce que les lanceurs commencent vraiment à être fatigués de tous ces gens, associations, donneurs de leçons en tout genre, qui ne sont pas eux-mêmes des lanceurs, qui s’autorisent à parler en leur nom et à leur place alors qu’ils ont une connaissance toute relative du sujet. N’en déplaise à tous ces gens, un lanceur n’est pas un délateur, un lanceur n’est pas motivé par un intérêt personnel, un lanceur ne fait pas de dénonciation pour se venger, un lanceur agit de bonne foi ce qui est la meilleure garantie d’un éventuel droit à l’erreur.
Nous le savons, MM. et ses animateurs gênent, car MM. maîtrise le sujet, parce que MM. est légitime dans sa parole et ses actions, et qu’ MM. ne se taira pas même si certains font tout pour l’évincer.
Être lanceur n’est pas un choix, ça n’est pas si je veux, comme je le veux, pas même quand je le veux !
MM.
						

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