Allez, encore un petit effort !

Article en référence : « Paradise Papers : la Commission européenne entame une procédure d’infraction contre Malte, Chypre et la Grèce », (ici) du journal Le Monde du 08 Mars 2018.

Nous vous rassurons tout de suite : il n’y a pas d’obsession particulière chez MetaMorphosis à l’encontre du Commissaire Moscovici. En raison de sa fonction au sein de la Commission Européenne, il est à son dépens souvent annonceur de mauvaises nouvelles, parfois, et nous l’en remercions, le porte parole de son incompétence, de sa mauvaise foi, quand il n’est pas le chargé en chef de l’humour bruxellois (« il n’y a pas de paradis fiscaux en Europe ») dont la compréhension et les subtilités ne sont pas toujours à la portée de tous…

Pour une fois, rendons lui grâce, le Sir Moscovici nous annonce une bonne nouvelle ! Explications…

Quatre mois après les révélations des « Paradise Papers », la Commission européenne communique : « Les Paradise Papers ont dévoilé une fraude à la TVA de grande ampleur dans le secteur des yachts », et annonce le lancement d’une procédure d’infraction contre la Grèce, Chypre et Malte pour leur taxation très avantageuse des navires de luxe. « Nous ne pouvons admettre ce type de traitement fiscal favorable accordé aux yachts privés, qui fausse la concurrence dans le secteur maritime », a également dénoncé le commissaire européen aux affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, en dénonçant une atteinte « à la justice fiscale ».

Rien que ça…

Le lancement de cette procédure d’infraction confirme que plusieurs des révélations faites en novembre 2017 par le Consortium International des Journalistes d’Investigation (ICIJ en anglais), ont permis de mettre à jour des schémas d’évasion fiscale illégale. Comme le rappelle Le Monde : « A Malte, les acheteurs de yachts peuvent en effet bénéficier d’une TVA à un taux réduit de 5,4 % et économiser ainsi potentiellement plusieurs centaines de milliers d’euros… En quelques années, cette petite île méditerranéenne est devenue grâce à cet avantage un des principaux lieux d’achat de yachts pour les riches du monde entier ».
Les avantages fiscaux en question résident dans un système de location-achat, baptisé «leasing maltais» qui permet de ne s’acquitter de la TVA que sur une infime partie du prix du bateau.
Le journal du soir nous précise enfin que les trois Etats disposent désormais de deux mois pour répondre à la Commission, qui pourra à terme leur imposer des sanctions financières s’ils ne mettent pas fin à ces pratiques.

Ne polémiquons pas, mais quand même.
Donc, sans l’ICIJ, qu’est ce qu’on fait ? Ou plutôt qu’est ce que font la Commission et son Commissaire ? Ils attendent ? Que les pays en infraction viennent s’auto-dénoncer ?
Nous qui pensions que l’administration européenne était une grande machine animée par les meilleurs esprits du continent ; nous qui pensions qu’elle était au service des citoyens des états membres pour y défendre la libre circulation des biens et des personnes dans le cadre d’une concurrence équitable ; nous qui pensions qu’elle disposait des outils, notamment comptables, pour lui permettre de suivre et vérifier que chacun se conforme à l’esprit et à la lettre de l’Union ! Sans l’ICIJ, elle ne voit rien ? Vous nous direz, ce n’est pas une première, l’enfumage de la Grèce sur sa dette publique avec l’aide active d’une certaine Goldman Sachs, reste dans les mémoires. Donc Grèce, Chypre et Malte vont peut-être être sanctionnés grâce au travail de la presse d’investigation… À quand un « joint-venture » Commission Européenne – ICIJ ?

Le Commissaire Moscovici a employé, pour lui en tous les cas, des mots forts (sans doute des gros mots pour certains) : « justice fiscale », « concurrence faussée ». Les mécanismes mis en place par les pays incriminés portent donc atteinte à la justice fiscale au sein de l’Union et faussent la concurrence. Rappelons, pour condamnables que soient ces pratiques, qu’elles restent en valeur absolue de faible montant. Très loin en tous les cas des pratiques des fameux États, Luxembourg, Pays-Bas, Irlande… qui ne sont pas, tout le monde l’aura compris, des paradis fiscaux.
Que la Commission nous explique la différence entre les pratiques des pavillons fiscaux et celles mises en œuvre en matière d’imposition des multi-nationales ou des personnes fortunées dans ces pays.
Que la Commission nous explique en quoi il y aurait d’un côté une atteinte à la concurrence entre les États membres, de l’autre une simple mise en concurrence entre États.
Que la Commission nous explique son échelle de graduation des atteintes à la justice fiscale…

Allez, encore un petit effort !
S’il faut commencer par les petits pour arriver aux gros, pourquoi pas…
S’il faut taper sur des États qui n’ont pas beaucoup de poids dans le cadre de l’Union, il ne faudrait pas que ce soit uniquement pour la façade, il ne faudra pas se déculotter devant ces autres États devenus de véritables usines d’injustice fiscale et de concurrence dévoyée…

Nous saurons bientôt si nous pouvons encore parler en bien du Commissaire Moscovici.

MM.

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