Il n’y a pas de lanceurs d’alerte « alternatifs »

Nous vous recommandons aujourd’hui la lecture (ici) de l’excellent article de Sarah Kilani et Thomas Moreau intitulé « Le Média sur la Syrie : naufrage du « journalisme alternatif » paru sur le site « lundimatin » du 28 Février 2018.

D’un point de vue factuel, le travail des deux auteurs, largement documenté et référencé, permet de mettre en évidence plusieurs biais fondamentaux du média de la France Insoumise.
D’une part une incompétence évidente de la chaîne et plus particulièrement de son « blogueur libanais » qui lui fait office « d’expert », sur les questions du conflit syrien.
La gravité extrême du sujet exigerait que Le Média maîtrise au minimum, la géographie des lieux, l’histoire du conflit, les origines et actions des forces en présence. Nous en sommes très loin, ça frise par moment le ridicule, malheureusement il n’y a pas de quoi en rire… Alors que la F.I. et son organe de presse « Le Média » fustigent à juste titre le recours abusif par la presse mainstream à des pseudo experts aux parcours et aux compétences litigieuses, ils utilisent au final les mêmes artifices. D’autre part, toute l’argumentation déployée sous couvert d’une volonté de ne pas prendre partie et de ne pas recourir au « sensationnel » conduit ce site à poser sur un pied d’égalité toutes les parties en présence, tout en prenant soin néanmoins de charger un peu plus la barque des forces non gouvernementales.
D’un côté, cet « argumentaire » est déjà un parti pris qui, n’en déplaise au Média, peut être perçu comme une volonté de replacer ce conflit au niveau des sentiments et non plus de la raison. D’un autre côté, et comme le soulignent très bien (exemples à l’appui) les deux auteurs de l’article, placer deux parties aux forces totalement disproportionnées sur un pied d’égalité, est à la fois une hérésie et une volonté idéologique bien comprise de « prendre parti ». Nous entendons en permanence la F.I. se plaindre du rapport de force totalement disproportionné à l’Assemblée Nationale entre la majorité présidentielle et l’opposition : pourquoi ne raisonnerions-nous pas sur le schéma Le Média – Syrie ?

Il ne s’agit pas à MetaMorphosis de refaire l’histoire du conflit syrien. Ce qui nous intéresse, comme nous l’avons déjà abordé à plusieurs reprises, c’est le rôle de la presse dans la manifestation et le suivi des alertes.
Au regard de l’état actuel de la presse d’investigation en France, de la mainmise d’intérêts politiques et économiques sur la quasi-totalité de la presse nationale et locale, l’émergence d’un nouveau média, qui se dit être indépendant et se disait non affilié à un parti politique, pouvait légitimement être perçu comme une opportunité d’enrichir le débat. Cela d’autant plus que le mouvement politique en question à l’initiative de sa création, s’est toujours présenté comme un défenseur inconditionnel des lanceurs d’alerte, de leurs combats et de leurs causes.

Cette triste histoire syrienne nous apprend que la main mise financière sur les médias, pour dangereuse qu’elle puisse être pour l’information, la liberté d’expression et l’investigation, n’est pas le seul biais qui guette les lanceurs d’alertes.
Le pouvoir de l’argent est en soi l’expression d’une idéologie, celle de la défense d’intérêts bien compris. Le parti pris doctrinaire, au mépris des réalités et de la vérité, dont a fait preuve Le Média, n’est pas bien différent et conduit aux mêmes appauvrissement et altération de l’information.

Définitivement le positionnement apolitique et non partisan de MetaMorphosis est un choix noble et fondamental.

MM.