Danske Bank – Comment cacher ce scandale que l’on ne saurait voir

Comment cacher ce scandale que l’on ne saurait voir: enterrer est une solution.
On reparle de la Danske Bank, accusée d’avoir mis en œuvre un énorme système de blanchiment d’argent au niveau européen, pour des sommes de l’ordre de 200 milliards d’euros. Une paille.

Financial Times- 28/04/2019

MetaMorphosis vous a déjà tenu au courant de cette affaire : ici, « Danske Bank : un cas d’école, un de plus… », ou encore là:

«Ce scandale parmi les plus gros d’Europe a vu jusqu’à 200 milliards d’euros d’argent suspect transiter par la filiale estonienne de la première banque danoise, entre 2007 et 2015, ainsi que celle-ci l’a elle-même reconnu en 2018».

➡️ Quoi de neuf donc ? Un enterrement en vue.

Le journal Le Monde, repris par une grande part de la presse européenne, s’en fait l’écho dans son édition du jour: l’autorité bancaire européenne (EBA) vient d’annoncer que l’on pouvait blanchir 200 milliards d’euros sans infraction aux lois et réglementations européennes censées régir le monde financier.

Extraordinaire, non ? Réaliser une activité interdite par la loi, ne conduit donc pas à la réalisation d’infractions aux mêmes lois.

«L’enquête de l’EBA (European Banking Authority), qui avait été demandée par le Parlement européen et la Commission européenne et ouverte en février, devait dire si les superviseurs bancaires danois (Finanstilsynet, DFSA) et estonien (Finantsinspektioon, EFSA) avaient failli dans leur mission de contrôle de la Danske Bank et enfreint la loi européenne. Non, il n’y a pas eu infraction, ont donc dit publiquement, le 16 avril, les superviseurs bancaires nationaux des vingt-huit pays de l’UE, qui composent le conseil des superviseurs de l’EBA».

Autant sur le fond que sur la forme, l’EBA n’y va pas avec le dos de la cuillère. Dans son malheur le groupe d’experts qu’elle avait elle-même mandaté, arrive à des conclusions totalement opposées : « Pas de violation de la loi de l’UE ? Ce n’est pourtant pas l’avis de la commission indépendante BUL (Breach of Union Law, violation du droit européen), qui avait été chargée de l’enquête et a remis au conseil de l’EBA, avant le vote, un rapport circonstancié démontrant qu’il y a eu violation. » Cette commission leur avait transmis une recommandation constatant l’infraction et enjoignant les superviseurs du Danemark et d’Estonie à renforcer et mettre aux normes leurs procédures de contrôle. Dans ce rapport classé confidentiel que s’est procuré Le Monde, cette commission BUL formée d’experts recrutés parmi six superviseurs nationaux et du président de l’EBA, conclut à «quatre infractions différentes au droit européen »

Quand les experts ne voient que du noir, l’EBA dit blanc. Pas très compliqué comme boulot que celui de superviseur européen du monde bancaire !

Une fois de plus, nous n’avons plus qu’à espérer que les parlementaires européens et la Commission fassent leur boulot.

Pour l’eurodéputé vert allemand Sven Giegold, en pointe dans la lutte contre la criminalité financière, le vote du 16 avril est un scandale : «en votant contre les recommandations de l’EBA, les autorités nationales de surveillance n’ont pas respecté leur obligation légale d’agir uniquement dans l’intérêt européen», affirme-t-il… Estimant que l’affaire est loin d’être finie, Sven Giegold appelle la Commission européenne à tenir compte de «l’échec du conseil des autorités de surveillance de l’EBA» et à «ouvrir des procédures d’infraction contre le Danemark et l’Estonie», pour «manquement à leurs obligations découlant des directives européennes».

Une fois de plus, cette affaire faisant suite à d’autres du même acabit, pose la question de l’utilité et de l’indépendance des autorités de surveillance du secteur bancaire, en France et dans la plupart des pays européens.

Nous sommes en face d’organismes qui faillissent à leur mission, défendent des intérêts privés contre l’intérêt général et au final représentent un risque important pour la collectivité là où leur principal travail serait justement d’agir afin de les réduire. Les lanceurs d’alertes du secteur financier en savent quelque chose: ce type d’organes de contrôle s’inscrit systématiquement aux abonnés absents.

MM.