Les vacances de Monsieur Hulot
«Les vacances de Monsieur Hulot», film de Jacques Tati de 1953.Monsieur Hulot est un personnage échappé du cinéma muet dans le monde du parlant. Il se heurte à la technologie, à un monde impersonnel et gadgétisé. Jacques Tati s’est servi de ses capacités de mime pour le confronter aux dérèglements, aux rites et au ridicule d’un monde en mutation. Il s’est inspiré pour la création de son personnage, de son voisin architecte, le grand-père de Nicolas Hulot.Ça tombe bien car c’est justement de Nicolas Hulot dont on voulait parler, ou plutôt «Les vacances du ministre Hulot», ministre de la transition écologique et solidaire.La suite ici : http://meta-m.org/index.php/2018/06/09/les-vacances-de-monsieur-hulot/
Publiée par MetaMorphosis sur samedi 9 juin 2018
«Les vacances de Monsieur Hulot», film de Jacques Tati de 1953.
Monsieur Hulot est un personnage échappé du cinéma muet dans le monde du parlant. Il se heurte à la technologie, à un monde impersonnel et gadgétisé. Jacques Tati s’est servi de ses capacités de mime pour le confronter aux dérèglements, aux rites et au ridicule d’un monde en mutation. Il s’est inspiré pour la création de son personnage, de son voisin architecte, le grand-père de Nicolas Hulot.
Ça tombe bien car c’est justement de Nicolas Hulot dont on voulait parler, ou plutôt «Les vacances du ministre Hulot», ministre de la transition écologique et solidaire.
Si l’on demande à Woerth -pour diriger la commission des finances de l’assemblée- d’être juste un bon président, pas nécessairement intègre, il n’y a pas de raison que l’on exige de monsieur Hulot d’être un écologiste à la tête de son ministère. D’ailleurs, n’a-t-il jamais été écologiste ?
En fait, on n’en sait pas grand-chose. Bon businessman c’est sûr, parvenant à se faire rémunérer par les plus grands pollueurs de la planète, réalisateur d’émissions télé à succès même si on apprécierait bien voir l’envers du décor comme pour Cousteau -et l’on risquerait d’avoir quelques surprises- bon ministre aussi car apprécié de ses patrons, mais il faut dire qu’il se donne du mal à leur ressembler. Il nous a tout de même gratifié récemment d’un grand classique de la politique politicienne dont il se vante être si éloigné; sur France-Inter, à la question d’un journaliste lui demandant si la non-inscription de la sortie du glyphosate dans la loi alimentation n’était pas un recul, un rendez-vous raté, il a répondu qu’il s’agissait selon lui d’un rendez-vous «incomplet». Décidément, on a beaucoup de mal à comprendre sur quelle planète vivent ces gens, étymologiquement un rendez-vous (qui est la rencontre entre deux ou plusieurs personnes à un endroit et un moment défini d’avance) a lieu ou n’a pas lieu. Hulot était seul à la rencontre et comme s’étant parlé à lui-même, très certainement a-t-il cru que le rendez-vous avait eu lieu ?!
Et dans tout ça, Hulot est-il écologiste ? Ça aurait pu être une question…
Comme Monsieur Hulot (celui des films), cherchons quelques indices dans l’actualité. Tout d’abord dans Libération du 09 Juin 2018, un article assez complet sur l’huile de palme sous l’intitulé «Biocarburant : Total jette de l’huile de palme sur le feu», ici.
Mercredi dernier, grâce au feu vert du ministre Hulot, la préfecture des Bouches-du-Rhône a autorisé le groupe Total à exploiter une bioraffinerie sur son site de la Mède, près de l’étang de Berre. Dès cet été, Total importera au moins 300.000 tonnes d’huile de palme par an, ce qui représente une augmentation des importations françaises de ce produit de 36%.
En juillet 2017, en présentant son plan climat, Nicolas Hulot proposait de «fermer la fenêtre d’opportunité qui permet d’incorporer de l’huile de palme dans les carburants». Mais dès sa nomination, le ministre a vite choisi de faire machine arrière. L’huile de palme a beaucoup de qualités : elle est facile à cultiver, et donc peu coûteuse; c’est un produit très stable, qui résiste à la chaleur et à l’oxydation; elle est facile à «travailler» dans un processus industriel.
Mais comme nous le savons tous, c’est une horreur. D’une part pour la santé des consommateurs (forts taux d’acides gras saturés…) mais aussi pour l’environnement.
Pour l’extraire, on se livre en Indonésie et en Malaisie (90% de la production) à une déforestation monstrueuse, afin de planter des palmiers à huile. Or, qui dit déforestation dit massacre des derniers orang-outans et des gibbons, destruction de la biodiversité, brûlis extrêmement polluants, expropriations de villages… Mais aussi aggravation du réchauffement climatique. Car, comme le rappelait Hulot avant qu’il ne soit ministre, «la déforestation est responsable de 10% des émissions de gaz à effet de serre mondiales».
Selon une étude commandée en 2016 par la Commission européenne, l’huile de palme est trois fois plus néfaste, en terme d’effets de serre, que les énergies fossiles.
La décision de Hulot est a priori incompréhensible. Elle est contraire aux intérêts des producteurs français de colza. Elle est contraire aux intérêts de la planète – et il n’y a pas et n’y aura de «planète B», pour paraphraser Macron qui jure avoir fait de la lutte contre le réchauffement climatique sa priorité. Elle est contraire à l’avis du Parlement européen qui, en janvier 2018, a voté la suppression de l’utilisation d’huile de palme dans les carburants d’ici 2021.
Pourquoi alors cette décision de Hulot ? Deux explications. D’une part un lobbying efficace de Total qui cherche à sauver son site de la Mède. D’autre part, une explication, plus cynique encore : la France vend des armes et des avions vers l’Indonésie et la Malaisie, et ces pays menacent de ne plus acheter ces engins si Paris nuisait à leurs exportations. On en revient à un grand classique français : « si c’est bon pour l’emploi ! »
Moralité : Macron, malgré les beaux discours, n’a que faire du climat et fait de la politique (avec de vieux arguments) ce qui est cohérent avec sa vision productiviste de l’économie et Hulot n’est pas sérieusement écologiste et qui plus est, est devenu au regard de sa capacité à se renier, un excellent politicien.
Autre indice. L’Observateur revient le 08 Juin sur la crise de l’apiculture avec le témoignage d’un professionnel du secteur sous le titre «Cet apiculteur a rencontré, jeudi, Nicolas Hulot. Mais il n’a rien obtenu de concret», ici.
Partout en France, les apiculteurs se sont mobilisés à l’appel de la Confédération paysanne et d’organisations apicoles, jeudi 07 Juin, pour demander un plan de soutien pour la sauvegarde des abeilles. Le ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, est venu à leur rencontre aux Invalides à Paris. «Tous ces sujets, on les a mis sur le tapis», (des mauvaises langues diront plutôt «sous le tapis» !) a assuré Hulot à des apiculteurs inquiets, notamment sur la sortie du glyphosate, «ce qui est important c’est que ce soit irréversible, programmé, et qu’on essaie que personne ne soit dans une impasse». Le ministre leur a promis de voir ce qui est possible de faire pour les aider. Ça fait plaisir et ça ne mange pas de pain…
Après leur rassemblement sur la place des Invalides, les apiculteurs ont pris la direction du Palais de l’Élysée avec leurs cadres d’abeilles décimées. Ils voulaient réaliser une action symbolique avant d’être reçus par le ministre de l’Agriculture dans l’après-midi, mais… ils ont été interrompus dans leur marche par les forces de l’ordre.
Derrière tout cet habillage médiatique, quelle réalité, quelles décisions, quelles actions, monsieur Hulot ?
Notre apiculteur ne semble pas convaincu, nous non plus.
Au final ce n’est pas tant le ministre Hulot qui est en vacances, mais bien l’écologie.
Un petit souvenir?
"Je présenterai, dans un temps très court, un nouveau plan pour lutter contre l'érosion de la #biodiversité. Mais je n'y arriverai pas si chacun à son niveau ne prend pas sa part de responsabilités" @n_hulot #QAG #DirectSenat pic.twitter.com/i5howFld2Q
— Écologique Solidaire 🌱 (@Min_Ecologie) 27 mars 2018
MM.