A Monaco aussi, on veut sa loi (ou pas) sur la protection des lanceurs d’alerte, mais…

Suite au vote de la loi Sapin II en France et pour répondre aux directives européennes en la matière, Monaco présente sa proposition loi sur la protection des lanceurs d’alerte relativement éloignée des recommandations européennes.
La lecture du texte ci-après vous en convaincra.
n° 229 – Proposition de loi relative à la protection des lanceurs d’alerte

Un point dans la proposition de loi parmi d’autres, mérite d’être souligné:
« Ne souhaitant pas accorder un blanc-seing, la bonne foi n’est pas suffisante, encore faut-il que l’information signalée ou révélée porte sur des faits bien particuliers. Sont ainsi concernées, en premier lieu, les informations révélant l’existence d’un crime ou d’un délit dont la peine d’emprisonnement encourue est supérieure ou égale à dix ans, ce qui inclut les infractions de blanchiment, de trafic d’influence et de corruption, à l’exception de la corruption passive et active commise par un agent privé. En revanche, force est de constater que la prise illégale d’intérêt prévue par l’article 114 du Code pénal n’est pas concernée. »

Pour être reconnu comme lanceur d’alerte à Monaco, dénoncer conformément à ses obligations professionnelles et ou légales des soupçons d’opérations illicites, n’est pas suffisant. Encore faut-il que les faits dénoncés soient passibles pour leurs auteurs, d’une peine égale ou supérieure à dix années!
D’une certaine façon le lanceur d’alerte à Monaco se transforme en auxiliaire de justice, à charge pour lui d’apprécier préalablement à son alerte, la peine potentiellement encourue pour ces faits !!!
Dénoncer des faits passibles d’une peine de neuf ans, dont on comprendra qu’ils représentent déjà une gravité certaine, n’est donc pas suffisant pour obtenir le statut de lanceur d’alerte.
D’une part, il apparaît pour le législateur Monégasque, que la gravité d’un crime n’est pas dans le crime lui-même mais dans la peine éventuellement encourue par son auteur, d’autre part, il fait totalement fi du processus judiciaire lui-même qui voudrait qu’au cours de l’enquête, des faits plus graves que ceux dénoncés puissent apparaître.
Il semble donc que le législateur monégasque souhaite que le statut du lanceur d’alerte soit conditionné au résultat même de l’enquête et du jugement judiciaire ce qui est en totale contradiction avec la définition du lanceur donnée par l’Europe, notamment sur les critères de bonne foi et de désintéressement.
Cela a pu faire dire au Ministre d’Etat Serge Telle, dans une interview donnée à L’Observateur de Monaco que les dénonciations réalisées dans le cadre de l’affaire banque Pasche Monaco, ne permettraient pas à leurs auteurs d’être reconnus comme lanceurs d’alerte en Principauté.
« C’est un texte très imparfait. Il faut l’améliorer pour que la protection juridique recherchée soit réelle. En effet, les lanceurs d’alerte dans l’affaire de la Banque Pasche par exemple n’auraient pas bénéficié de la protection, le texte prévoyant des délits condamnés à une peine de 10 ans. »

Outre le fait que l’on puisse s’étonner qu’une Autorité politique semble connaitre avant l’ordonnance de renvoi le résultat de l’enquête judiciaire rappelant certaines pratiques mises à jour récemment par la presse française dans l’affaire Rybolovlev/ Bouvier, il faut donc comprendre que les faits documentés à la fois par Médiapart, et Pièces à Convictions d’une gravité certaine et concernant des personnes aujourd’hui poursuivies par la justice Américaine et plusieurs justices européennes, ne seraient pas suffisants aux yeux de Monaco pour accorder une protection, à ceux qui n’ont fait que répondre aux obligations légales et professionnelles que Monaco lui-même leur impose.

Les mauvaises langues diront certainement que si Monaco ne voulait pas de lanceurs d’alerte, il ne s’y serait pas pris autrement.

Souhaitons que l’Europe rappelle à Monaco qu’il est encore temps de revoir sa copie, un tel projet en l’état étant incompatible avec ses propres recommandations.

Et pour bien vous faire prendre des vessies pour des lanternes, on va jusqu’à s’en vanter auprès de Snowden….

A l’AFD, l’affaire de la centrale à charbon ne passe pas, celle du lanceur non plus

L’Agence française de développement a de nouveau reporté sa décision sur un prêt de 41 millions d’euros à la Chine pour équiper une centrale à charbon d’un système de chauffage urbain. Une enquête interne recherche « la source » de Mediapart.

Malgré les semaines, la polémique ne s’éteint pas. L’Agence Française de Développement (AFD), principal organe public d’aide au développement, a de nouveau reporté sa décision concernant un prêt de 41 millions d’euros à la Chine pour aider une centrale à charbon à construire un système de chauffage urbain dans la région du Xinjiang. Initialement inscrite à l’ordre du jour du conseil d’administration de novembre, l’étude de ce projet avait été décalée une première fois, à la suite de sa révélation par Médiapart , à quelques jours du sommet sur le financement de l’action climatique organisé par l’Élysée, le One Planet Summit. La décision devait avoir lieu lors du conseil d’administration du 21 décembre.
La suite ici sur Médiapart

Sollicitée par Médiapart, à savoir s’il était prévu un abandon du projet, l’AFD au slogan « 100 % accord de Paris » a refusé de répondre. Pire encore,elle aurait ouvert une enquête interne afin de découvrir « la source » . Philippe Bauduin, le directeur général adjoint de l’agence, affirme que « quelqu’un a transmis à l’extérieur de cette maison des documents confidentiels. Il s’agit d’une grave faute et d’un acte de déloyauté inacceptable à l’égard de cette maison qui mérite de fortes sanctions »

Pour enterrer l’objectif de l’Accord de Paris, un engagement visiblement creux, il va falloir « faire taire » le lanceur d’alerte.

A suivre…

Guide pratique pour aider les lanceurs d’alerte: 60 pages pour ne pas déraper

Il y a un an, la France s’est dotée d’un régime de protection des lanceurs d’alerte parmi les plus avancés en Europe (loi dite Sapin 2). Pour autant, un citoyen ou salarié mal informé de ses droits et obligations peut commettre des erreurs irréparables en lançant l’alerte et perdre la protection garantie par la loi. Transparency International France offre avec ce guide pratique, premier outil citoyen, les clefs pour agir, se protéger et se défendre.

Lanceurs d’alerte, qui peut alerter, comment et quelle protection ?

Rappel: Le lanceur d’alerte est une personne qui, dans le contexte de sa relation de travail, signale un fait illégal, illicite et dangereux, touchant à l’intérêt général, aux personnes ou aux instances ayant le pouvoir d’y mettre fin. Il s’agit de personnes physiques, ce qui exclut les personnes morales, associations, ONG, les IRP (institutions représentatives du personnel) dans les entreprises, les organisations syndicales, mais aussi les journalistes, les inspecteurs du travail, les magistrats etc.

Lancer l’alerte en trois phases:
1/ le signalement de l’alerte doit être porté à la connaissance de son supérieur hiérarchique, direct ou indirect, ou de son employeur ou d’un référent désigné par l’employeur.
2/ Si l’alerte n’a pas été saisie et/ou vérifiée dans un délai raisonnable, le lanceur d’alerte peut saisir l’autorité judiciaire, administrative ou son ordre professionnel,voire le Défenseur des droits (Guide ci-après).
La phase 1/ et 2/ peuvent se faire concomitamment avec possibilité de rendre public le signalement, si le danger est grave et imminent ou présente un risque de dommage irréversible.
3/ Alerter la presse si l’autorité destinataire ne réagit pas dans un délai de trois mois après la réception du signalement.

Les protections:
Les lanceurs d’alerte bénéficieront des protections contre les représailles (sanction disciplinaire, licenciement, baisse de salaire, etc.), et d’anonymat lors du signalement.
La nouvelle législation instaure également de nouvelles sanctions afin de protéger le lanceur d’alerte. Est ainsi puni de 2 ans de prison et 30 000 euros d’amende le fait de révéler l’identité de l’auteur du signalement.
Toutefois précisons aussi que dans le sens inverse, un lanceur d’alerte peut également être poursuivi en cas de faux signalement. La loi prévoit une amende civile dont le montant peut atteindre jusqu’à 30 000 euros.

Pour plus d’information:
Guide du Lanceur d’alerte

Si nous avons un conseil à vous donner, consultez rapidement un avocat.

Vous pouvez vous rapprocher et/ou saisir aussi le Défenseur des droits:
Guide du Défenseur des droits

Bonne lecture.

A force de laisser dire n’importe quoi, on devient n’importe quoi

A chaque semaine son lanceur d’alerte.

Aujourd’hui nous sommes heureux d’accueillir Emmanuel Macron, lanceur d’alerte dans le domaine climatique, qui vient de nous alerter sur l’existence d’un réchauffement de la planète.

La semaine passée, grâce au journal « Les Echos », nous apprenions que les banques avaient rejoint la communauté des lanceurs d’alerte pour peu qu’elles dénoncent « leurs employés indélicats ».
Quand les banques deviennent des lanceurs d’alerte

Il n’est pas une semaine sans qu’un journaliste en mal d’inspiration et désireux de surfer sur une vague à la mode, décrète que tel ou tel confronté à des problèmes de droit du travail ou droit commercial est un lanceur d’alerte.
Il n’est pas une semaine sans découvrir des auto-proclamations de lanceurs d’alerte, que ce soit pour des motifs personnels ou catégoriels. De toute évidence, la définition du lanceur d’alerte est tellement passée et repassée au hachoir de la peopolisation, qu’elle en a perdu tout sens.
Il est regrettable de constater qu’un certain nombre de journalistes par facilité se prêtent à ce jeu, nous présentant des personnes ou des catégories professionnelles revendiquant (souvent légitimement) pour les conditions d’exercice de leur profession, comme des lanceurs d’alerte. Il est effrayant de constater que sous prétexte de différends de natures techniques, commerciales ou structurelles, certains cherchent à obtenir une reconnaissance via le statut du lanceur.
Que certains soient en mal de reconnaissance est un fait. Que cela nuise fortement aux « réels lanceurs d’alerte » en est un autre et nous concerne directement. On ne s’y prendrait en effet pas autrement si on voulait nous marginaliser et nous décrédibiliser. La défense d’un intérêt personnel et catégoriel pour légitime qu’elle soit, ne relève pas du lançage d’alerte; des droits et des tribunaux, des moyens de revendication existent pour se faire.
Un intérêt personnel et catégoriel n’est pas l’intérêt général. Comment une catégorie professionnelle peut elle décréter que ses revendications concernent l’ensemble de la Société? Seule la loi définit ce qu’une Société considère à un moment comme devant relever de l’intérêt général. Pour imparfaite et incomplète qu’elle soit, la Loi Sapin II a l’avantage de donner une définition précise et complète du lanceur d’alerte.
Il doit s’agir d’une personne ayant une connaissance directe des faits illégaux ou illégitimes dénoncés, et qu’elle intervienne dans l’intérêt général.
Sur ce point, nous voyons bien que toute revendication relative à la détérioration de conditions de travail, souvent par le biais d’une organisation représentative ne relève absolument pas du lançage d’alerte.
Nous , lanceurs d’alerte du Collectif MetaMorphosis, parce que nous sommes les premières victimes de cette banalisation du statut du lanceur d’alerte, nous nous opposons catégoriquement à cette utilisation abusive, surtout quand elle est entretenue par des journalistes qui ne font au final que se servir de la situation difficile de certains pour s’octroyer une petite actualité. Il faut être un vrai lanceur d’alerte, répondant à la définition précédente et ayant respecté les processus de dénonciation définis par la loi; il faut être un vrai lanceur d’alerte subissant pendant de longues années déclassement personnel, social faisant l’objet d’un blacklistage professionnel et se confronter à l’inaction endémique de la justice et de tous les organes de contrôles, pour mesurer la différence fondamentale avec un salarié ou une catégorie professionnelle revendiquant pour ses droits. La différence fondamentale est à ce niveau: une fois qu’il a fait sa dénonciation, le lanceur d’alerte n’a plus aucun droit et sera traité comme un coupable. Il n’est reconnu comme victime de rien mais fait les frais de tout.

MM.

Pourquoi MetaMorphosis: par Nicolas Forissier

Ancien auditeur chez UBS France, Nicolas Forissier fait partie de ceux qui ont révélé le vaste système de fraude fiscale mis en place par la banque suisse. Il raconte le calvaire que lui ont valu ses révélations.
« En décembre 2008, j’ai envoyé un document d’une dizaine de pages au « responsable risques » du groupe en France.
Le lendemain matin, j’étais convoqué par mon PDG : je sais que le responsable risques a balancé mon nom. Après cela, ils ont fait fuiter l’affaire dans la boîte. Je suis devenu le vilain petit canard. On a donné l’ordre à certains collaborateurs de ne pas m’adresser la parole! » Nicolas Forissier a fini par être licencié, après des mois de placardisation.
La suite? l’insoutenable solitude et un long combat à mener.
Les rudes lendemains des lanceurs d’alerte

Pour briser le silence, MetaMorphosis. Interrogé par Carole Rouaud, Nicolas vous explique pourquoi.

Parce que la protection des lanceurs d’alerte ce n’est pas de la cosmétique !

Parce que la protection des lanceurs d’alerte ce n’est pas de la cosmétique !
Et, par conséquent, pourquoi il faut des initiatives telles que le collectif MétaMorphosis !
On s’entend dire ça assez souvent : mais il y a une Loi maintenant, et une lanceuse a même été relaxée…

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Les lanceurs et la finance

Entretien Médiapart: Ils ont tiré la sonnette d’alarme. Sans eux, le monde caché de la finance offshore et de l’évasion fiscale n’aurait pas été révélé.

Les invités:
– HSBC : Hervé Falciani
– UBS France : Stéphanie Gibaud
– Société générale : Sylvain P. (informaticien de la société de courtage de la SG)
– Banque Pasche Monaco : Mathieu Chérioux; Pour plus d’info: ici et

Rencontre avec Alain et Éric Bocquet auteurs de « SANS DOMICILE FISC » aux éditions du Cherche Midi.
Intervention de Nicolas Forissier, lanceur d’alerte ex cadre de la banque UBS:
Évasion, optimisation fiscale et fraude font perdre chaque année entre 60 et 100 milliards d’euros au budget de la France et plus de 1 000 milliards en Europe. Conséquences de la lutte molle de nos gouvernements, l’école, la culture, l’hôpital, la justice, les équipements publics, les collectivités perdent des moyens pour répondre aux besoins des citoyens. Cette austérité qui mine l’État gangrène la démocratie et ouvre la porte aux extrémismes.

Détournement de la loi Handicap, entretien avec Gilles Mendes

France-Inter, Le Téléphone sonne du 16/11/2016
Grâce à la pugnacité du journaliste Mikaël Thébaut, l’interlocuteur de l’ADAPT finit par répondre et admettre que ce qui est décrit par le lanceur d’alerte Gilles Mendes, (en ligne) existe très précisément.

“Il y a des fraudes à la loi Handicap au détriment des travailleurs handicapés”
Ancien informaticien dans un groupe d’imprimeries du département de la Manche, Gilles Mendes a entamé une démarche de lanceur d’alerte. Il accuse son ancien employeur d’avoir monté un système de fraudes présumées à la loi Handicap de 2005, privant ainsi les travailleurs handicapés de fonds normalement destinés à leur embauche. Après avoir tiré la sonnette d’alarme auprès de différentes institutions et des cabinets du ministère du Travail et de l’Intérieur, il lance un appel au Lanceur.fr – Entretien mené par Antoine Dreyfus: Le lanceur

Loi Sapin 2: du rêve à la réalité

URGENT! Que celui qui bénéficie de la Sapin 2, nous fasse signe! Merci

Luxleaks : « La protection des sources a été bafouée »


Condamné au Luxembourg dans le dossier Luxleaks, le lanceur d’alerte messin Raphaël Halet, avec un journaliste, contre-attaquent. Demain, à Metz, ils réclament l’annulation d’actes de procédure. En jeu : la protection des sources.
Le Républicain Lorrain