Des mondes parallèles


Promis, ensuite on arrête. Non pas que nous fassions une fixation sur les «us et coutumes» judiciaires français, sur certains fonctionnements de nos politiques, mais à notre corps défendant, l’actualité nous donne quand même matière à nous émerveiller! Trois brèves du jour qui en plus de nous étonner, appellent à la réflexion.

➡️ Nous avons déjà parlé dans MetaMorphosis (ici), du beau scandale planétaire, l’affaire 1MDB.
Quoi de neuf sous le soleil malaisien ? Le New York Times s’en fait l’écho dans son édition du jour («Najib Razak, Malaysia’s Ex-Prime Minister, Is Arrested Amid Corruption Inquiry»), ici, information reprise par l’ensemble de la presse internationale : «Najib Razak, the former prime minister of Malaysia who was ousted in an election two months ago, was arrested by anticorruption officials on Tuesday, amid an investigation involving billions of dollars diverted from a state investment fund».
L’instruction de cette gigantesque affaire de corruption, un bon 4 milliards de dollars, sous l’impulsion du nouveau gouvernement malaisien, entre dans une nouvelle phase avec la mise en cause directe des anciens responsables politiques. «His successor as prime minister, Mahathir Mohamad, campaigned on bringing Mr. Najib to justice, and after his inauguration, officials moved to block Mr. Najib and his wife, Rosmah Mansor, from leaving the country. American prosecutors have accused Mr. Najib, 64, of diverting into his personal bank account $731 million from the state investment fund, which he supervised for years. Money siphoned from the fund, known as 1MDB, was then spent on luxury goods, such as a $27.3 million pink diamond necklace that was worn by Mr. Najib’s wife, American investigators said».
Pour nous qui vivons «au pays des droits de l’homme», il y a matière à s’étonner. Pas de connivence de castes comme chez nos politiciens toutes couleurs confondues, pas de levée d’immunité de toute sorte, pas de cours de justice de la république qui prendra soin de ne condamner personne. Dans ce pays exotique qu’est la Malaisie, un ancien chef de gouvernement suspecté est mis en examen, ses comptes bancaires sont bloqués et il est arrêté sans qu’il soit nécessaire d’obtenir l’accord de ses camarades de caste. Certes, les faits reprochés sont très sérieux, mais la Malaisie n’a pas le monopole d’anciens responsables de haut rang sur lesquels pèsent des accusations d’une extrême gravité.
En notre belle République, dans une telle situation nous pouvons encore nous permettre de pavaner devant le Panthéon en professant des discours sur la morale et l’honneur! Le système politique est en fait construit autour de l’absence totale de responsabilités qui permet que se diffuse ce poison, le sentiment d’impunité généralisé.
Nous vous avions promis que nous n’y reviendrions pas, pas si sûr. Car l’affaire 1MDB recèle d’autres informations, passées quasiment inaperçues dans la presse française.
Nous avions appris que Leonardo Di Caprio aurait été gratifié et le film «Les Loups de Wall-Street» financé l’un et l’autre par de l’argent détourné du fond malaisien, mais voilà que nous découvrons également dans cette affaire 1Mdb, la présence directe ou indirecte de quelques personnalités françaises.
En effet, certains hommes d’affaires ou politiques français auraient des liens avec les personnalités citées dans cette affaire : Nicolas Sarkozy est un proche de Khadem al-Qubaisi, ce dernier ayant financé les conférences du premier à Abu Dhabi, rémunérées chacune 100 000 euros.
Le milliardaire français Bernard Arnault, propriétaire de LVMH, a siégé au conseil consultatif de ce fond souverain malaisien durant 3 ans. Et Bernard Squarcini, ancien directeur du renseignement intérieur français sous Nicolas Sarkozy, a travaillé pour Khadem al-Qubaisi. Il a été approché par l’Émirati pour enquêter sur des témoins qui pourraient être gênants dans cette histoire…
Le Parquet National Financier, comme beaucoup d’autres juridictions internationales, enquête sur cette affaire. Donc à suivre… MetaMorphosis aimerait bien en fait pouvoir en reparler!

➡️ Sans doute aujourd’hui, avec celle de la FIFA l’autre grande affaire de corruption internationale dont MetaMorphosis s’est également fait le messager (ici), celle dite du «Lava Jato» («lavage express»).
Petit rappel : l’opération «Lava Jato» (ou scandale Petrobras) est une enquête de la police fédérale du Brésil qui a commencé en mars 2014, concernant une affaire de corruption et de blanchiment d’argent impliquant notamment la société pétrolière publique Petrobras. Elle est dirigée par le juge Sergio Moro qui a ensuite relié l’enquête à l’affaire Odebrecht. Les faits reprochés incluent des commissions pour des personnalités politiques de toutes affiliations en échange de leur implication dans des contrats publics surfacturés. L’affaire concernerait un volume de près de 3,5 milliards de dollars au Brésil seul.

Scandale de corruption d’ampleur inédite, le petrolão a, dans ses premières phases, mené à l’emprisonnement des directeurs des entreprises OAS, IESA Óleo e Gás, Camargo Corrêa Construções, UTC et Construtora Queiroz e Galvão ainsi qu’un des ex-directeurs de Petrobras, Paulo Roberto Costa.
Les partis les plus concernés sont le Parti progressiste (droite), le Parti du mouvement démocratique brésilien (centre) et le Parti des travailleurs (gauche). Par la suite cette affaire a pris au Brésil une ampleur inédite conduisant à la destitution d’une Présidente et à l’emprisonnement d’un ancien chef d’État, avant de s’étendre à tout le continent sud-américain en touchant la quasi-totalité des pays, y compris ceux se proclamant anti-capitalistes comme le Vénézuéla (implication de personnes proches de Maduro) ou la Bolivie.
Une belle affaire, de grande ampleur ayant conduit à l’implication et même l’incarcération de politiques et chefs d’entreprises de premier plan. Voilà qui est fait.
Cependant pour tout lanceur d’alerte, il y a un trou béant que quasi seul le Jornal Do Brasil va tenter de combler: «Enfim, bancos na Lava Jato» (ici) («Finalement, des banques dans Lava Jato»).
Les juges brésiliens, non supposés plus intelligents que leurs confrères français, semblent avoir fait une découverte extraordinaire : un système tel que «Lava Jato» (on doit se poser la même question pour 1MDB) ne peut fonctionner et même exister sans la passivité au mieux, voire la complaisance ou pire la collaboration du système bancaire.
«O jornal “O Estado de S. Paulo” revelou, em 8 de junho, que a Receita Federal encontrou indícios que apontam para a responsabilidade dos bancos nesses contratos de câmbio fraudulentos usados para lavagem de dinheiro. A informação consta em balanço produzido pelo Fisco sobre sua atuação na operação Lava Jato. O documento cita cinco tipos de omissões por parte de bancos e corretoras de valores. O Bradesco hospedou 39 contas dessas empresas de fachada mantidas pelo grupo de Youssef. O Itaú Unibanco 18 e o Santander, 13. Além deles, o Banco do Brasil hospedou 11 contas, Caixa, 13 e o Citibank outras 15».
En France, sauf à ce qu’elles soient mises directement en cause, il est très rare dans les affaires de corruption que la justice aille au bout du processus jusqu’à devoir rechercher les responsabilités des institutions financières.

➡️ Enfin, une dernière brève, et un détour dans le monde parallèle de nos élites. Les Échos nous l’annonce : «Les ministres évalués mais sans sanction à la clef» (ici). «Le Premier ministre entame ce mardi une série d’entretiens d’évaluation avec ses ministres, comme le lui avait demandé, lors du dernier séminaire gouvernemental , le chef de l’État. Une opération qui durera tout le mois de juillet. Durant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron l’avait assuré, s’il était élu, «l’efficacité» de ses futurs ministres serait «évaluée régulièrement». Et, poursuivait-il dans cet entretien au «Journal du dimanche», «je déciderai une fois par an, en lien avec le Premier ministre, de les reconduire ou pas». Mais là, pas question de «reconduire ou pas».
À quoi sert une évaluation si elle n’est pas suivie d’une réévaluation de la situation et la prise de sanction quand il y a insuffisance ? Décidément, ces gens vivent dans un autre monde; ils ont une méconnaissance totale de celui de l’entreprise dont ils nous rabâchent pourtant en permanence l’exemplarité…
Ce gouvernement est la parfaite illustration qu’il fonctionne tel un conseil d’administration, endroit où les sanctions sont rarement prises même en cas de carences graves ou de malversations criantes.

Des mondes parallèles!

MM.

Interpol, une police sous influence ?

C’est une solide enquête qu’ont menée Mathieu Martinière et Robert Schmidt sur Interpol, organisation mondiale créée le 7 septembre 1923 dans le but de promouvoir la coopération policière internationale. Cette organisation est connue pour délivrer, entre autres, des notices rouges, documents d’alerte qui une fois publiés permettent d’assurer la traque planétaire de criminels recherchés dans le monde.

Toutefois, est-elle indépendante ?
Comment se finance t-elle ?

Le documentaire revient en détail sur ces points, soulignant les limites de ses actions, les conflits d’intérêt et collusion dans lesquels elle bascule.

Si dans l’imaginaire collectif, cette institution évoque un univers d’enquêteurs aux pouvoirs considérables, faute de moyens financiers et de volonté des États membres pouvant lui assurer financièrement une indépendance et un fonctionnement optimal, la présente enquête nous dévoile les revers de la médaille d’une organisation fonctionnant sur fonds privés et exposée à de graves conflits d’intérêts.

Quid de son indépendance, éthique et efficience ?

Un reportage édifiant, disponible du 15/03/2018 au 18/05/2018.

MM.

Brèves du front

➡️Pas de ça chez nous !

Le verrou de Bercy, nous en parlions ces derniers jours.
Médiapart publie une longue enquête sur le système d’évasion fiscale Pinault (Médiapart, 18 Mars 2018 – Le système Pinault : une évasion à 2,5 milliards d’euros, ici).
Le groupe Kering, propriété de la famille Pinault, est initialement connu pour être l’un des principaux acteurs mondiaux du luxe. Bientôt, il risque d’être reconnu comme l’un des leaders français de l’industrie de l’évasion fiscale. Médiapart l’indique en tête d’article : «C’est la plus grosse affaire d’évasion fiscale présumée mise au jour pour une entreprise française». On prendra plaisir à lire l’enquête qui relate le processus mis en œuvre et décrit «l’organisation» d’évasion fiscale.
Au demeurant, le système Pinault n’est pas très original: superposition de techniques basiques d’évasion, agencées ici en une véritable industrie de la fraude. Un vent de panique non étranger à cette situation, semble s’emparer des dirigeants. Soulignons aussi qu’il n’y aurait aucune fausse nécessité économique à procéder de la sorte au regard des résultats très confortables du groupe de luxe et de ses implantations… Mener un tel système à un tel niveau de fraude (2,5 milliards d’euros) relève, ici aussi, d’un principe idéologique; l’oligarchie se situant au-dessus des contingences communes, elle a le droit de dicter les règles qui régissent la société tout en étant exempte de ses plus contraignantes. Médiapart nous le rappelle : la principale victime de ce système d’évasion fiscale de grande envergure est le fisc italien, l’importance de la marque Gucci dans les résultats de Kering expliquant cela. La France n’est toutefois pas en reste. Décidément, nos amis italiens ne sont pas très sérieux ! Au lieu de régler ça entre gens de bonne compagnie, ils ont levé une armada de juges et de policiers financiers pour traquer les fonds perdus… de Gucci. Convocations, auditions, perquisitions, mises en examen, procès demain… tout ce qui relève d’une justice « normale ». Longue histoire politique aidante, ils se souviennent que l’acceptation et l’assujettissement à l’impôt sont l’un des fondements de nos républiques démocratiques, contrairement aux français révolutionnaires de 1789 qui semblent avoir la mémoire courte.
Faisons un peu de politique fiscale fiction à la française au cas où l’essentiel de la fraude toucherait notre pays. Pas de juge, hors course et pour plus « d’efficacité », Darmanin devrait s’en occuper. On demande à M. Pinault ou à l’un de ses sbires, s’il veut bien avoir l’obligeance de se rendre à Bercy pour discuter d’une «affaire le concernant». Rien de pressé, de toute façon c’est un homme très occupé, et puis, lui, il créé des emplois! Il est reçu en grande pompe par un Directeur de haut vol (qui pense peut-être à une future reconversion), par un chef de cabinet, par le Ministre lui-même! Bon, un peu sérieux, nous n’allons pas l’embêter plus longtemps avec des histoires d’argent, c’est vulgaire… Une fraude de 2,5 milliards (!), soyons «efficace», 100 millions et on n’en parle plus !

➡️ Quand les policiers se font lanceurs !

Où l’on reparle (encore) d’Interpol (Médiapart, 19 Mars 2018 – Après la FIFA, Interpol se fait financer par le Qatar et le CIO, ici).
Il y a quelques semaines nous apprenions qu’Interpol avait reçu des financements de la part de la FIFA. Le partenariat signé entre les deux organisations en 2011 était destiné -ça ne s’invente pas- à promouvoir «l’intégrité dans le sport». Nous savons ce qu’il est advenu de cette collaboration suite aux différents scandales FIFA. Une fois de plus, entreprises et organisations n’apprennent rien de leurs erreurs : plus de FIFA, Interpol se tourne vers le Qatar et le CIO, choix pour le moins judicieux… Il faudra un jour que nous leur fassions un scanner pour savoir ce qu’il se passe dans la tête de ces gens là !
Cerise sur le gâteau dans cette affaire, il y a eu quand même des alertes! En l’occurrence des policiers qui alertent d’autres policiers, on croit rêver… Pourtant le message était clair : «La coopération d’Interpol avec la Fifa est regardée avec beaucoup de scepticisme dans de nombreux pays européens, dû aux nombreuses allégations de corruption qui ont été portées contre les dirigeants de la Fifa».
On rassure les (vrais) lanceurs, ces alertes n’ont servi à rien, la Direction d’Interpol a continué à faire ce que bon lui semblait, comme si de rien n’était. Au final, rien de bien anormal.

➡️ Justice privée ou justice pour tous ?

Importante décision de la Cour européenne de Justice, l’un des derniers bastions de défenses des libertés collectives et personnelles. Le site «bastamag» nous informe dans son édition du 19 Mars 2018 : « La Cour de justice européenne invalide le principe des tribunaux privés d’arbitrage », ici.
«Est-ce le début de la fin pour les tribunaux privés d’arbitrage, ces fameux « ISDS » (Investor State Dispute Settlement), qui permettent à des investisseurs d’attaquer des États auprès de juridictions privées composés d’avocats d’affaires ? La Cour européenne de justice, la plus haute juridiction de l’Union européenne, vient de rendre un jugement décisif au sujet des ces mécanismes. Ce jugement porte sur un cas opposant un assureur privé néerlandais à l’État slovaque, et invalide le principe même de ces mécanismes d’arbitrage s’ils concernent des acteurs de l’Union européenne».
Rappelons que ces arbitrages privés sont au cœur des très controversés accords de libre-échange comme le Ceta, entre l’UE et le Canada, ou le TTIP, entre l’UE et les Etats-Unis. Ils permettent à des investisseurs privés de faire condamner des États s’ils jugent leurs politiques défavorables à leur rentabilité.
Ainsi, «le groupe énergétique suédois Vattenfall réclame plus de 4 milliards d’euros à l’Allemagne pour avoir décidé en 2011 de sortir du nucléaire… Et a attaqué la région allemande de Hambourg pour avoir renforcé les normes environnementales d’une centrale à charbon».
«Puisque la Cour européenne de Justice juge les traités d’investissement intra-européen incompatibles avec le droit européen, ce sont environ 200 autres traités d’investissement qui contiennent des clauses d’ISDS qui pourraient être remis en cause», a réagi l’ONG Client Earth. «La décision marque la fin des ISDS en Europe. L’ISDS n’est pas seulement un outil qui permet aux multinationales de faire pression sur les prises de décision d’intérêt général. C’est aussi, on le voit avec ce jugement, incompatible avec le droit européen».
Sage et saine décision. Pour les multinationales, la justice reste l’un des derniers secteurs à «ouvrir à la concurrence». Privatisation des aéroports ou de la justice, remise en cause du statut de telle profession ou des juges, tout ceci relève de la même logique.

MM.

Corruption à la Fifa : on vous raconte l’incroyable procès à New York

Du JDD – le 20 décembre 2017

Ouvert le 6 novembre, le procès de la corruption à la Fifa s’achève à New York dans une ambiance baroque.

Depuis un mois et demi, le cœur malade du football mondial bat la chamade au tribunal fédéral de Brooklyn, à New York. Là, dans la salle d’audience 4F, le procès du « Fifagate » se révèle encore plus détonant qu’on ne pouvait l’imaginer quand, en mai 2015 à Zurich, la justice américaine avait procédé au spectaculaire coup de filet qui avait provoqué la chute du tout- puissant président de la Fédération internationale de football (Fifa), le Suisse Joseph Blatter. Edifiant sur les pratiques de corruption qui ont eu cours pendant des décennies au sein du gouvernement du ballon rond. Mais aussi surréaliste dans son déroulement et ses répercussions. Alors que l’affaire 15-CR-252 attend son verdict, les révélations se sont enchaînées dans une ­atmosphère qui oscillait entre Les Soprano et la télé-réalité.
Récit

Mondial de foot au Qatar: une filiale du Crédit mutuel est dans le viseur

Selon nos informations, la justice brésilienne et le FBI américain enquêtent sur un virement de 22 millions de dollars effectué par le Qatar, via une filiale du Crédit mutuel, en lien avec le scandale de corruption sur l’attribution du Mondial de foot 2022 à l’émirat. Révélations.

La banque française Crédit mutuel-CIC a-t-elle, par l’entremise d’une ancienne filiale, servi de plateforme de corruption dans le cadre de l’attribution du Mondial 2022 au Qatar ? C’est ce que soupçonnent désormais les enquêteurs du FBI et de la justice brésilienne. Selon nos informations, les procureurs de ces deux pays ont identifié un versement de 22 millions de dollars en provenance du Qatar sur le compte ouvert à la banque Pasche Monaco par l’ancien président de la fédération brésilienne de football (CBF), Ricardo Teixeira, peu après le vote de décembre 2010 qui a attribué le Mondial au Qatar.
Mondial de foot au Qatar: une filiale du Crédit mutuel est dans le viseur

Procès FIFA: un témoin décrit la corruption généralisée en Amérique latine

Ouverture du procès-
Le procès américain sur le scandale de corruption présumée au sein de la FIFA a débuté lundi 13 novembre 2017 à New-York. Quarante-deux personnalités sont impliquées dans cette affaire qui avait grand bruit en 2015.
Entreprises écrans, comptes cachés à l’étranger, enveloppes de cash, villas luxueuses et œuvres d’art… L’enquête sur la corruption présumée au sein de la FIFA a mis au jour des pratiques diverses, chiffrées en centaines de millions de dollars de pots-de-vin et de rétrocommissions.
Le premier témoin dans le procès FIFA, Alejandro Burzaco, a brossé mardi un tableau accablant de la corruption au sein du football sud-américain, avec des millions de dollars de pots-de-vin payés pour les droits télé des tournois du continent ou pour choisir des pays hôtes de la Coupe du monde.
Il dirigeait, depuis 2006 et jusqu’à son inculpation par la justice américaine en mai 2015, une puissante société argentine directement impliquée dans de multiples contrats de droits télé en Amérique du Sud, et au coeur de ce système.
Récit

La justice française trouve 71 millions de réals dans le compte de Ricardo Teixeira

Enquête de Jamil Chade, Brésilien basé à Genève, spécialiste de la finance et du foot –

Le leader Ricardo Teixeira est soupçonné d’avoir acheté des voix pour le Qatar, hôte de la Coupe du monde de football de 2022

Ancien président de la Confédération brésilienne de football (CBF), Ricardo Teixeira est dans le viseur de la justice française. Soupçonné d’avoir participé à un programme d’achat de vote au Qatar pour la Coupe du Monde en 2022, il serait détenteur d’un compte bancaire au solde de 22 millions de dollars (71,1 millions de réals ) dans la banque Pasche à Monaco et identifié par les procureurs français.
La banque Pasche, filiale de la banque française Crédit Mutuel, est soupçonnée d’implication dans le blanchiment d’argent. Deux enquêtes judiciaires sont en cours, une en Principauté de Monaco, l’autre en France.

C’est dans une enquête en cours au Parquet de Paris sur le détournement présumé de fonds dans l’acquisition de sociétés françaises, qu’apparaîtrait indirectement l’ancien président de la CBF. Cette affaire en croiserait une autre, tenue par le Parquet en Suisse, concernant l’achat de votes pour le Qatar hôte de la Coupe 2022 et dont les soupçons remonteraient à 2010 et porteraient sur un match amical Brésil/ Argentine disputé à Doha, qui aurait servi à masquer l’achat de voix en faveur du Qatar, mêlant l’homme d’affaires Qatari Ghanem ben Saad al-Saad, ancien président du fond Qatari Diar quant à son rôle dans la négociation impliquant la Coupe du monde du Qatar .
À l’époque, le fond Qatari Diar disposait de 60 milliards de dollars américains (193,9 milliards de reals) destinés à des investissements immobiliers (hôtels de luxe, tels que le Royal Monceau) et prises de participations dans des sociétés (telles dans les multinationales Vinci et Veolia), Paris étant l’un des centres d’intérêt de ses administrateurs.
Ce sont les investissements et la gestion d’Al-Saad qui auraient suscité l’intérêt de l’Office Central Anti-Corruption de Nanterre: L’agence soupçonnerait des détournements de fonds lors de l’acquisition de 5% des actions de la société de services collectifs Veolia . Lors de la négociation, 182 millions d’euros (697 millions de reals) en commissions cachées auraient été détournés vers trois sociétés situées dans des paradis fiscaux. Le procureur financier de Paris essaie d’identifier où sont passés les fonds, le mécanisme financier utilisé pour cette transaction, avec le cas échéant, la rémunération des dirigeants du Brésil et de l’Argentine. Al Saad est soupçonné d’avoir partagé 8,6 millions de dollars (28,2 millions de reals) entre amis, en trois parties: l’un d’eux, aurait perçu environ 2 millions de dollars, sur un compte à Singapour, les autres fonds auraient été versés à Teixeira et un dirigeant argentin.
Al-Saad, proche de l’émir du Qatar Tamim Ben Hamad al-Thani, est fondateur et PDG de l’entreprise GSSG (Ghanin Bin Saad Al Saad Group & Sons), Holding œuvrant dans la construction, l’aéronautique, le pétrole et la finance et qui s’avérerait être aussi la société ayant financé et parrainé le match entre le Brésil et l’Argentine le 17 Novembre 2010, soit deux semaines avant le vote Fifa pour choisir le Qatar 2022 siège de la Coupe du Monde.

C’est ainsi que l’affaire Qatar-Veolia, rejoint l’enquête suisse concernant l’achat de voix pour la Coupe du Monde 2022.

Traduction libre- article original de R7.com (Brésilien) du 27/10/2017, ci-après:
Justiça acha R$ 71 milhões em conta suspeita de Ricardo Teixeira