Comme à son habitude, Macron est arrivé au G20 le museau fier, décidé à ne pas se laisser marcher sur les pieds. De la posture. Pas question soi-disant de négocier quoi que ce soit avec le Brésil de Bolsonaro si celui-ci décidait de sortir de l’accord sur le climat COP21 comme il avait pu le laisser entendre. Bolsonaro dont on pouvait penser qu’il était l’un des meilleurs exemples de la politique en « mode bulldozer », s’est facilement joué de notre auto-proclamé président intellectuel, pour lequel il y eut, une fois de plus, beaucoup de bruit en amont pour pas grand chose à la sortie…sauf une imposture.
Comme les engagements ne valent que pour ceux qui y croient, en bon tacticien, Bolsonaro a indiqué que son pays demeurait dans l’accord de la COP21, ce qui ne l’empêche pas depuis qu’il est au pouvoir, de prendre moult décisions qui vont à l’encontre même des objectifs fixés.
Pour clore le tout, déclarer demeurer dans l’accord s’est avéré suffisant pour notre président approuvant par conséquent, la signature par l’Europe d’un accord de libre échange avec le Mercosur.
Cette façon de faire et quel que soit le sujet, semble chez lui une habitude. Les reculades, on connait bien, et elles se voient ! Hier encore, Mediapart s’en faisait l’écho au sujet de l’attitude de la France suite à la dénonciation par Trump de l’accord sur le nucléaire iranien. Les autorités perses sont en fait autant remontées contre l’attitude ambiguë et le double discours permanent de Macron, que par la décision de Trump elle-même…
Pour revenir à nos questions environnementales, la signature de cet accord de libre échange est analysée par la plupart des associations comme un blanc seing donné à Bolsonaro pour continuer son jeu de massacre.
Nous savons tous que sans une Amazonie protégée, il sera impossible au minimum de réaliser les objectifs de la COP21.
Or, de ce point de vue, les discours mais surtout les actions du nouveau pouvoir brésilien sont très clairs: la forêt amazonienne ne sert à rien donc il faut l’exploiter à son maximum pour en tirer quelques revenus.
L’accord de libre échange ne vient que conforter cette position.
Au sein même de la majorité LREM des voix s’élèvent comme celle du député Jean-Baptiste Moreau, agriculteur de profession qui, dans une interview donnée au journal Le Monde, rappelle l’état désastreux des sols brésiliens suite à l’utilisation massive de pesticides et surtout la quasi impossibilité pour la plupart des pays sud américains d’obtenir une traçabilité satisfaisante des produits agricoles qui grâce à ce nouvel accord commercial auront à présent portes ouvertes en Europe. Rappelons quand même toutes les conditions en la matière que l’Europe impose à ses propres agriculteurs alors que les produits demain importés, vont s’en trouver, eux, de facto exemptés…
Nous avions gardé en mémoire de nos cours d’économie à la fac, qu’une concurrence saine et équilibrée voulait que tous les acteurs soient soumis aux mêmes règles et subissent les mêmes contraintes. Malgré les beaux discours, le libéralisme économique ne semble être l’affaire ni de l’Europe, pas même de Macron…
Au-delà d’encourager un écocide en n’imposant aucune condition stricte dans les pays sud américains et plus particulièrement au Brésil, Macron et l’Europe par la signature dudit traité, encouragent Bolsonaro dans son attaque systématique et violente à l’encontre des peuples indigènes d’Amazonie.
Même Nicolas Hulot qui pourtant lors de son passage dans ce gouvernement n’a pas démontré une vocation affirmée à défendre l’environnement, s’en étonne dans une interview donnée au journal Le Monde, rappelant que cette ouverture des vannes commerciales entre les deux continents, va avoir pour conséquence l’expropriation des peuples indigènes de leurs terres, et conforter Bolsonaro dans sa remise en cause des droits desdits peuples aujourd’hui garantis par la constitution.
Nous ne voyons pas très bien ce qui pourrait être de nature à stopper l’entreprise funeste du président brésilien quand on constate depuis plusieurs mois, après avoir donné carte blanche aux forces de police dès son arrivée au pouvoir, qu’aujourd’hui dans l’Etat de Rio le nombre de morts du fait de l’action policière progresse plus vite que celui imputé aux organisations criminelles elles-mêmes ! La signature de cet accord commercial est donc à plus d’un titre en l’état actuel une erreur fondamentale aux conséquences tout aussi rapides: elle va lourdement pénaliser les agriculteurs européens dont on connaît tous déjà les grandes difficultés, elle va accentuer l’état désastreux de l’environnement brésilien et encourager les autorités locales à poursuivre leur politique de criminalisation des peuples indigènes et des défenseurs locaux de l’environnement qui paient déjà un lourd tribu; les grands propriétaires terriens estiment avec Bolsonaro, bénéficier, eux, d’une totale impunité pour faire taire par tout moyen les contestations.
Sur d’autres sujets, comme la crise des réfugiés et les ventes d’armes, l’Europe ne sort pas grandie de la signature d’un tel accord et une fois de plus porte atteinte à ses principes fondateurs.
Concernant Macron, il n’est plus temps de dire qu’il a une position ambiguë sur certains sujets. Sur celui-ci comme sur d’autres, seuls de potentiels gains économiques prévalent sur toutes autres considérations, de préférence aux bénéfices d’intérêts qui lui sont proches quitte même, comme le sujet qui nous occupe le démontre, à bafouer des principes essentiels du modèle économique qu’il prétend défendre. De l’imposture.
Suite à l’accostage du Sea-watch3 à Lampedusa, nous apprenons que la France dans sa grande bonté qui la caractérise, accueillera dix réfugiés. Suite aux déclarations d’autorités iraniennes nous apprenons que pour préserver ses ventes d’armes aux pays du Golfe, la France fait le jeu de Trump et joue contre cet accord sur le nucléaire que l’Iran respecte à la lettre depuis l’origine et qui permet même s’il n’est pas parfait, d’assurer une sécurité certaine dans la région . Enfin, suite à la signature de cet accord Mercosur, la France fait le choix de jouer contre ses propres agriculteurs et d’encourager Bolsonaro dans son entreprise de destruction.
Tout ceci sont des décisions de Macron et de son gouvernement, engageant la France sans doute sur certains points de façon irréversible, dans des entreprises destructrices dont on peut penser qu’une majorité de la population n’y souscrit pas. En même temps, depuis quand Macron commence-t-il à se soucier de ce que peut penser le peuple français ? Une large démonstration est faite en matière de politique intérieure…De la posture. Alors à quoi sert-il ?
MM.