On voudrait bien y croire, mais…

Il y a des jours comme ça, on se dit que ça va être une bonne journée…

Dans son édition du jour, Le Monde (ici) nous informe du départ du «numéro deux» de la Société Générale : le directeur général délégué, Didier Valet, quitte en effet le groupe vendredi.
Comme l’indique le quotidien : «La justice américaine a le bras long. Très long». On se fait tout de suite plaisir avec «l’explication obscure» de la banque : «à la suite d’une différence d’appréciation dans la gestion d’un dossier juridique spécifique du groupe, antérieur à son mandat de directeur général délégué, Didier Valet, soucieux de préserver l’intérêt général de la banque, a présenté sa démission».
Décidément, le ridicule ne tue pas, sinon la Société Générale serait morte depuis longtemps. Après les «fake-news» made in Société Générale, la vérité : le départ de Didier Valet a été imposé par les autorités judiciaires américaines, à l’image du débarquement de membres de l’état-major de BNP-Paribas suite à l’accord conclu en mai 2014 concernant la violation des embargos américains, qui s’était traduit par une amende pharaonique de 9 milliards de dollars (7,3 milliards d’euros). Outre l’affaire du Libor, la Société générale négocie avec la justice outre-Atlantique pour régler deux autres litiges. «Comme BNP Paribas, Deutsche Bank ou le Crédit agricole avant lui, l’établissement fait d’abord l’objet d’une enquête de l’OFAC, le bureau du Trésor américain qui gère les sanctions financières à l’encontre de ceux ayant contourné les embargos américains à l’encontre de l’Iran, Cuba ou le Soudan. Ensuite, il doit répondre à des accusations de corruption concernant ses opérations avec le fonds souverain libyen Libyan Investment Authority (LIA)».
Pour comprendre ce que les Etats-Unis reprochent désormais à la Société générale, il faut se rappeler comment fonctionne le Libor. Ce thermomètre du marché monétaire est déterminé chaque jour à Londres à partir des déclarations des banques partenaires qui indiquent à quel taux elles empruntent au jour le jour.
Sur le Libor, la Société générale est accusée d’avoir minoré, entre mai 2010 et octobre 2011 ses déclarations quotidiennes de taux, afin de ne pas apparaître fragilisée durant la crise de l’euro en révélant qu’elle empruntait plus cher que ses concurrents, signe d’une défiance de la communauté financière. En août 2017, la justice de l’Etat de New York a inculpé deux salariées de la trésorerie du groupe, Danielle Sindzingre et Muriel Bescond. Ce sont elles qui déterminaient au sein de la banque les estimations transmises à Thomson Reuters, le gestionnaire du Libor. La justice américaine les accuse d’avoir « délibérément » donné des estimations basses concernant le Libor en dollar. «Si la trésorerie dépend de la salle des marchés, elle est copilotée par la direction financière. Or, Didier Valet était directeur financier de la banque entre mai 2008 et décembre 2011. Il a participé à des réunions où ces questions ont été évoquées».
Pour la justice américaine, c’est impardonnable, et la sanction semble logique. Mais c’est là que le bas blesse : tout le monde au siège de la Société Générale loue «l’éthique irréprochable» de Didier Valet… Décidément les banques françaises sont incorrigibles. Parce qu’il faudra quand même nous expliquer quelque chose : comment peut-on (en même temps pour être dans l’air du temps) signer un accord avec la justice américaine valant reconnaissance de culpabilité dont celle de son numéro deux, et ne pas entamer à son encontre et de tous les autres responsables impliqués les procédures adéquates, la première victime de cette affaire étant la banque, ses actionnaires et ses salariés ? Si un gestionnaire de compte vient à voler sur les comptes de ses clients, la banque reconnaissant sa responsabilité en les remboursant, on la voit mal ne pas poursuivre son employé indélicat. Deux poids, deux mesures.
Donc ne nous réjouissons pas trop vite. Si la décision de la justice américaine est un bon signal, elle demeurera vaine si elle n’est pas de nature à modifier en plus des comportements, les mentalités. Et il apparaît malheureusement que le chemin est encore long.
Deuxième bonne nouvelle ? The Guardian (ici) nous annonce la fermeture prochaine du fameux cabinet panaméen Mossack & Fonseca. Comme pour la Société Générale, nous sommes gratifiés d’un communiqué officiel, grand art de la langue de bois : «The reputational deterioration, the media campaign, the financial circus and the unusual actions by certain Panamanian authorities, have occasioned an irreversible damage that necessitates the obligatory ceasing of public operations at the end of the current month». Voilà, bravo messieurs les journalistes, vous avez un mort sur la conscience ! Revenons, là aussi, à la vérité. L’industrie de la fraude fiscale a bon dos, Mossack & Fonseca n’est que l’un des acteurs panaméens de cette activité au demeurant tout à fait légale dans ce pays. Le problème de la fraude fiscale n’est pas une question entre des pays d’un côté, et un cabinet de l’autre, mais entre deux pays. Si certains pays européens souhaitent mettre fin à cette évasion fiscale massive, ce n’est pas avec Mossack & Foncesa qu’ils doivent traiter mais avec le Panama. C’est que l’on oublie un peu vite les autres affaires Mossack & Fonseca, mis à jour ou non lors des révélations du ICIJ, à savoir le blanchiment massif d’argent d’activités illicites (cartels de la drogue) et la fameuse affaire de corruption latino-américaine Odebrecht (groupe de BTP brésilien). Il convient en effet de rappeler que les deux associés du cabinet ont été placés en détention provisoire au Panama dans le cadre de ce scandale de corruption. Le ministère public qui les accuse de blanchiment de capitaux, avait perquisitionné leur cabinet. Selon le procureur Kenia Porcell, Mossack Fonseca est soupçonné d’être «une organisation criminelle qui se chargeait de cacher des actifs et des sommes d’argent à l’origine douteuse». Le cabinet a également pour rôle, selon elle, «d’éliminer les preuves [contre] des personnes impliquées dans les activités illégales liées au cas “Lavage Express”».

Une fois de plus, on voit qu’il y a plus d’un pas entre le discours et la réalité. Mossack & Fonseca nous quitte pour avoir industrialisé, comme tant d’autres, l’évasion fiscale ? On peut en douter… Si l’on doit bien évidemment s’en réjouir, nous sommes toujours dans l’attente d’une action forte des pays européens à l’encontre de ces territoires et de tous les intermédiaires, notamment agissant à partir de leur sol, rendant possible l’évasion fiscale. Or sur ce chapitre et à cette heure-ci, c’est plutôt le calme plat.

Allé, on cherche encore. Une success-story ? De ces histoires qui font rêver toute la macronie heureuse. C’est le Washington Post (ici) qui nous raconte cette merveilleuse histoire. Une femme, Elizabeth Holmes, jeune, blonde, partie de rien, fondatrice et Chief Executive d’une start-up… Et ce n’est pas tout, le cadre est idyllique : la Silicon Valley, les nouvelles technologies, une biotech, Theramos. Ça nous change de nos fonctionnaires qui ne pensent qu’à défendre leur statut, incapables de prendre des risques, de briser les «chaînes de l’assistanat».
Le hic, c’est qu’Elizabeth a un peu trop écouté Emmanuel. Notamment quand il conseille de ne jamais respecter les règles. Notre héroïne, alliée à son associé, n’y est pas allée avec le dos de la cuillère et ça a fini par se voir : «The SEC alleges that Holmes, Balwani and Theranos raised more than $700 million from investors by misrepresenting the capabilities of the proprietary blood-testing technology that was at the core of its business — as well as by making misleading or exaggerated statements about the company’s financial status and relationships with commercial partners and the Department of Defense». Ce qu’on lui reproche : d’avoir menti aux investisseurs, à ses clients, au marché, sur la réalité des activités de Theranos, d’avoir exagéré et trafiqué les comptes de la société… En somme, rien de bien extraordinaire !
Jina Choi, directrice du bureau régional de San Francisco de la SEC trouve les mots justes : «The Theranos story is an important lesson for Silicon Valley. Innovators who seek to revolutionize and disrupt an industry must tell investors the truth about what their technology can do today, not just what they hope it might do someday».

La leçon de l’histoire ne serait-elle pas plutôt que pour faire rêver, il faut vendre du rêve ?

Au final, on aurait bien voulu y croire … mais… Le responsable de la Société Générale, éjecté de son poste sur ordre de la justice, reste pour la banque quelqu’un à «l’éthique irréprochable». Le cabinet Mossack & Fonseca met la clé sous la porte, un autre doit être en train d’ouvrir et les pays européens regardent toujours partir l’argent…

Nos politiques vendent du rêve pour se faire élire, les entreprises aussi.

Au final, c’est une journée comme une autre.

MM.

Allez, encore un petit effort !

Article en référence : « Paradise Papers : la Commission européenne entame une procédure d’infraction contre Malte, Chypre et la Grèce », (ici) du journal Le Monde du 08 Mars 2018.

Nous vous rassurons tout de suite : il n’y a pas d’obsession particulière chez MetaMorphosis à l’encontre du Commissaire Moscovici. En raison de sa fonction au sein de la Commission Européenne, il est à son dépens souvent annonceur de mauvaises nouvelles, parfois, et nous l’en remercions, le porte parole de son incompétence, de sa mauvaise foi, quand il n’est pas le chargé en chef de l’humour bruxellois (« il n’y a pas de paradis fiscaux en Europe ») dont la compréhension et les subtilités ne sont pas toujours à la portée de tous…

Pour une fois, rendons lui grâce, le Sir Moscovici nous annonce une bonne nouvelle ! Explications…

Quatre mois après les révélations des « Paradise Papers », la Commission européenne communique : « Les Paradise Papers ont dévoilé une fraude à la TVA de grande ampleur dans le secteur des yachts », et annonce le lancement d’une procédure d’infraction contre la Grèce, Chypre et Malte pour leur taxation très avantageuse des navires de luxe. « Nous ne pouvons admettre ce type de traitement fiscal favorable accordé aux yachts privés, qui fausse la concurrence dans le secteur maritime », a également dénoncé le commissaire européen aux affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, en dénonçant une atteinte « à la justice fiscale ».

Rien que ça…

Le lancement de cette procédure d’infraction confirme que plusieurs des révélations faites en novembre 2017 par le Consortium International des Journalistes d’Investigation (ICIJ en anglais), ont permis de mettre à jour des schémas d’évasion fiscale illégale. Comme le rappelle Le Monde : « A Malte, les acheteurs de yachts peuvent en effet bénéficier d’une TVA à un taux réduit de 5,4 % et économiser ainsi potentiellement plusieurs centaines de milliers d’euros… En quelques années, cette petite île méditerranéenne est devenue grâce à cet avantage un des principaux lieux d’achat de yachts pour les riches du monde entier ».
Les avantages fiscaux en question résident dans un système de location-achat, baptisé «leasing maltais» qui permet de ne s’acquitter de la TVA que sur une infime partie du prix du bateau.
Le journal du soir nous précise enfin que les trois Etats disposent désormais de deux mois pour répondre à la Commission, qui pourra à terme leur imposer des sanctions financières s’ils ne mettent pas fin à ces pratiques.

Ne polémiquons pas, mais quand même.
Donc, sans l’ICIJ, qu’est ce qu’on fait ? Ou plutôt qu’est ce que font la Commission et son Commissaire ? Ils attendent ? Que les pays en infraction viennent s’auto-dénoncer ?
Nous qui pensions que l’administration européenne était une grande machine animée par les meilleurs esprits du continent ; nous qui pensions qu’elle était au service des citoyens des états membres pour y défendre la libre circulation des biens et des personnes dans le cadre d’une concurrence équitable ; nous qui pensions qu’elle disposait des outils, notamment comptables, pour lui permettre de suivre et vérifier que chacun se conforme à l’esprit et à la lettre de l’Union ! Sans l’ICIJ, elle ne voit rien ? Vous nous direz, ce n’est pas une première, l’enfumage de la Grèce sur sa dette publique avec l’aide active d’une certaine Goldman Sachs, reste dans les mémoires. Donc Grèce, Chypre et Malte vont peut-être être sanctionnés grâce au travail de la presse d’investigation… À quand un « joint-venture » Commission Européenne – ICIJ ?

Le Commissaire Moscovici a employé, pour lui en tous les cas, des mots forts (sans doute des gros mots pour certains) : « justice fiscale », « concurrence faussée ». Les mécanismes mis en place par les pays incriminés portent donc atteinte à la justice fiscale au sein de l’Union et faussent la concurrence. Rappelons, pour condamnables que soient ces pratiques, qu’elles restent en valeur absolue de faible montant. Très loin en tous les cas des pratiques des fameux États, Luxembourg, Pays-Bas, Irlande… qui ne sont pas, tout le monde l’aura compris, des paradis fiscaux.
Que la Commission nous explique la différence entre les pratiques des pavillons fiscaux et celles mises en œuvre en matière d’imposition des multi-nationales ou des personnes fortunées dans ces pays.
Que la Commission nous explique en quoi il y aurait d’un côté une atteinte à la concurrence entre les États membres, de l’autre une simple mise en concurrence entre États.
Que la Commission nous explique son échelle de graduation des atteintes à la justice fiscale…

Allez, encore un petit effort !
S’il faut commencer par les petits pour arriver aux gros, pourquoi pas…
S’il faut taper sur des États qui n’ont pas beaucoup de poids dans le cadre de l’Union, il ne faudrait pas que ce soit uniquement pour la façade, il ne faudra pas se déculotter devant ces autres États devenus de véritables usines d’injustice fiscale et de concurrence dévoyée…

Nous saurons bientôt si nous pouvons encore parler en bien du Commissaire Moscovici.

MM.

Quand on veut on peut : l’exemple néerlandais

Les Pays-Bas, paradis fiscal au sein de l’Europe, n’en déplaise au Commissaire Moscovici, Aveugle en Chef au pays des non-voyants, nous montreraient-ils l’exemple ?
L’excellent site bruxellois « Finance Watch » dont nous vous recommandons la consultation périodique, nous relate une information reprise en France par le journal économique « Les Echos » (ici), lui même source d’une information publiée par « Het Financieele Dagblad ».

Si les Pays-Bas sont un paradis fiscal, logiquement les banques locales participent à cet état de fait et s’exposent comme ailleurs à être rattrapées par la justice pour certaines de leurs « activités ».
C’est ce qui arrive à la banque néerlandaise ING, citée et poursuivie dans plusieurs affaires de corruption et de blanchiment d’argent. Ces affaires connues sous le nom de « Dossier Houston » selon la terminologie des services de l’Administration, ont démontré une défaillance majeure de la banque « en matière d’intégrité ».
On y retrouve de la corruption sur marchés, qui a notamment conduit le fisc américain à poursuivre la banque (amende transactionnelle de 1,76 milliards de dollars), des versements de sommes non justifiés au bénéfice de la fille du Président d’Ouzbékistan et de blanchiment d’argent lié au secteur des casinos dans les Antilles, tout ceci en lien avec la famille de l’ex-Président angolais Dos Santos. Sont notamment mises en cause, la mauvaise foi de la banque dans la dénonciation des opérations douteuses en temps et en heure, et la mise en oeuvre d’un réseau organisé d’évasion et de fraude fiscale au travers d’un trust financier opaque.

Nous avons malheureusement envie de dire « rien de bien exceptionnel » pour une grande banque internationale, les faits déjà jugés ou en cours d’instruction d’autres grandes banques, n’étant pas tellement différents.
Le modèle sous jacent aux grandes banques étant semblable d’un pays à l’autre, il n’y aurait aucune raison de penser que les banques françaises ou celles ayant la licence d’exercer en France aient des comportements différents. Plusieurs affaires récentes ou toujours en cours d’instruction confirment des circuits comparables, les « activités » de blanchiment d’argent étant « gérées » par leur non déclaration aux Autorités compétentes et celles d’évasion et de fraudes fiscales par le biais de structures offshores opaques.

Ce qui est à la fois étonnant et remarquable dans le cas d’ING, compte tenu de la relative permissivité des Autorités locales à ce type d’opération, c’est la réaction des Autorités judiciaires et de contrôle néerlandaises.
Là où, en France notamment, on se satisfera de pieux engagements de l’institution incriminée à « faire le nécessaire », là où on va se satisfaire de simples modifications de procédures sans contrôle de leur effectivité et efficacité, les Autorités des Pays-Bas, ont elles, décidé de prendre la main.
La banque ING est en effet placée sous une forme de « curatelle » de la justice et du fisc néerlandais, ces administrations souhaitant garder la main mise sur la marche des affaires au sein de la banque.

Si elles s’en souciaient, nos propres Autorités judiciaires et administratives en charge d’assurer le bon fonctionnement des établissements bancaires sous licence, sauraient d’expérience que l’on ne peut se satisfaire de simples engagements de bonne conduite.
Combien de banques en France après des scandales retentissants se sont vues imposer de telles contraintes ? Combien de Société Générale faudra-t-il pour que des mesures efficaces sur les activités de marché soient imposées ? Combien de scandales de blanchiment ou de fraude fiscale, tant qu’on ne se sera pas assuré au minimum que les établissements respectent et fassent respecter les procédures de compliance ?

La façon dont les Pays-Bas ont traité le cas ING, nous semble devoir devenir la règle, c’est à dire la mise sous tutelle immédiate de la banque soupçonnée ou accusée d’opérations de blanchiment ou de fraude fiscale, car nous devons expliquer ici quelque chose dont les non initiés à ces activités bancaires, n’ont sans doute pas la mesure. Dans ces activités, très largement et fortement réglementées depuis le début des années 2000, connaître l’origine des fonds et la nature économique des opérations, est le B.A.BA du travail de banquier.

En dépit de la multiplication de ces types d’affaire, et parce que l’on veut souvent nous les présenter comme complexes alors qu’elles sont d’une très grande simplicité, on nous donne l’impression qu’il s’agirait d’activités exceptionnelles et difficiles à appréhender. Il n’en est évidemment rien, le banquier ayant toujours la possibilité, en cas de doute, de ne pas faire. Et plus encore, en cas de soupçon, il se doit de « déclarer », conformément à ses obligations professionnelles.
Suffisamment d’outils et de supports existent pour permettre d’allumer les voyants rouges et cette faculté qu’ont certains banquiers à découvrir la couleur du feu à posteriori, est désarmante. On en arrive ainsi, dans certaines affaires, à des situations où des banquiers ayant commis des manquements caractérisés et indiscutables à la loi, se retrouvent inquiétés, non pas pour les faits commis (et alors qu’ils avaient généralement les moyens de privilégier le principe de précaution), mais pour ne pas les avoir déclarés conformément à leur obligation.

Comme chez Kafka, on se retrouverait, à titre d’exemple, dans la position d’un automobiliste contrôlé avec 3 grammes d’alcool dans le sang, et qui serait uniquement verbalisé, non pas pour ce taux d’alcoolémie, mais pour ne pas avoir informé qu’il conduirait sous l’emprise de l’alcool. Pire, on le laisserait repartir en voiture avec une éventuelle future convocation à se présenter devant la justice.

Ne pas agir comme le font les Autorités néerlandaises, c’est tout simplement dire : « Nous savons ce que vous avez fait, on vous laisse régler ça en interne et on verra plus tard… le temps qu’on trouve… si on cherche. »

MM.

De quoi les procédures bâillons sont-elles le nom

Dans l’article « Apple ne pourra pas interdire à Attac l’accès à ses magasins » publié ce jour, Le Monde (ici) nous informe que le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris a débouté la société américaine Apple, qui demandait l’interdiction d’accès à ses magasins français à l’association altermondialiste Attac, sous peine d’une astreinte de 150 000 euros par violation de l’interdiction ainsi que du versement à la marque à la pomme de 3 000 euros.
« La simple pénétration de militants dans l’enceinte du magasin Apple Store Opéra, ou dans d’autres magasins situés en France, sans violence, sans dégradation, et sans blocage de l’accès du magasin à la clientèle, ne suffit pas à caractériser un dommage imminent justifiant de limiter le droit à la liberté d’expression et à la liberté de manifestation », note le TGI de Paris dans son délibéré. Le juge a en outre condamné Apple à payer à Attac (Association pour la Taxation des Transactions financières et pour l’Action Citoyenne) la somme de 2 000 euros en remboursement des frais engagés. Julien Pignon, l’avocat d’Attac France, a salué « le refus du juge de se prêter à une procédure bâillon ».
Le cas Apple / Attac vient se rajouter à la longue liste des conflits opposant des grands groupes industriels (généralement de dimension internationale), parfois des politiques ou des chefs d’entreprise, à des associations de défense, des journalistes et bien souvent des lanceurs d’alerte. Nous devons tout de suite souligner la généralisation de ce type de procédures malgré des différences notables entre ceux qui les instruisent. Si nous prenons le champion français toute catégorie en la matière, Bolloré, et le cas d’Apple, nous voyons tout de suite des différences notables dans l’exercice de leurs métiers respectifs.
Que certaines des conditions dans lesquelles Apple exerce son activité (filières sous-traitantes asiatiques, politique de prix, politique d’optimisation fiscale, politique d’obsolescence programmée…) soient condamnables et doivent être combattues à l’image de ce que fait Attac, cela ne fait aucun doute. On peut néanmoins reconnaître au géant américain, une volonté permanente d’innovation, un souci de répondre aux attentes de ses clients (même si cela se fait à renfort excessif de publicité), une quasi-obsession d’associer ou d’acquérir les meilleures technologies pour les faire grandir dans ses propres produits. Nous ne pouvons bien évidemment pas en dire autant de notre champion français : l’innovation, le souci de ses clients (et de ses salariés), la stratégie industrielle de ses acquisitions, autant de cours de management qu’il a dû manquer !!
Revenons à ces chères procédures bâillons. Ce dont elles ne sont pas le nom, c’est que ce ne sont pas des procédures sur le fond. Apple ne conteste pas le fait d’être accusé de pratiquer l’optimisation fiscale, jusqu’à l’écœurement. Bolloré ne conteste pas en attaquant les auteurs de « Bolloré tout puissant », le fait d’avoir censuré le reportage Crédit Mutuel. Nous pourrions multiplier les exemples, y compris dans les procédures menées à l’encontre de chercheurs et universitaires, nouvelle lubie des grands groupes.
Bien évidemment nous n’oublierons pas les lanceurs d’alerte, les plus chouchoutés des excités de la procédure bâillon, où la partie leur est rendue facile du fait de la vulnérabilité des « accusés ».
Il convient de rappeler que si en France, ces procédures sont relativement récentes, la diffamation, spécificité du droit français, accentue le phénomène. « Nous avons un droit à la diffamation qui frappe avant et qui juge après », explique Sandrine Clavel, avocate. « Dans une plainte pour diffamation, il y a constitution de partie civile et une mise en examen automatique. C’est donc à l’accusé de démontrer qu’il n’y a pas eu diffamation. Il y a donc une présomption que le délit a été commis. »
De quoi les procédures bâillons sont-elles le nom ? Du silence, tout simplement. Pour vivre heureux, vivons cachés… Comme souvent l’affaire est croustillante : se sont ceux qui réclament toujours un peu plus de liberté (on dit déréglementation, dérégulation…) pour exercer leur métier (sous entendu pour le bénéfice de l’intérêt général), qui veulent réduire au silence ceux qui ont un avis contraire, les priver de leur liberté de penser et de dire.
En réalité, ce que cherche à contester Apple c’est le droit de dire d’Attac, avec ses moyens et à sa façon, que le groupe étasunien est devenu meilleur expert en optimisation fiscale qu’en téléphonie mobile. Ce que conteste Bolloré, ce n’est pas la censure, ses méthodes de gestion, ses pratiques managériales, mais qu’on le dise, pire qu’on l’écrive. D’une certaine façon nous pourrions comprendre qu’ils n’aient pas intérêt à attaquer sur le fond. Pour Apple, la plupart des pratiques fiscales mises en œuvres sont légales : attaquer sur le fond c’est reconnaître que quelque chose clocherait. Pour Bolloré, pourquoi attaquer sur le fond puisque même le régulateur, le CSA, n’en a rien à faire. Les lanceurs d’alerte connaissent bien cette situation : quasiment pas d’attaques sur le fond, sur les faits, toujours sur l’accessoire, pour épuiser, discréditer.

Une réforme judiciaire de la diffamation et des procédures bâillons est urgente, en s’inspirant peut être du modèle canadien qui contraint de mener la procédure à son terme. Une nouvelle fois, décidément nous nous répètons beaucoup sur MetaMorphosis, le problème est en amont : quand appellera-t-on un chat un chat, de l’optimisation à grande échelle de la fraude, de la censure de la censure, du blanchiment du blanchiment ?

MM.

Éthique de l’entreprise: le Crédit Mutuel vous fait la leçon

« Le droit de l’Union Européenne permet-il une éthique de l’entreprise ? » C’est ce à quoi essayera de répondre Nicolas Théry, président du Crédit Mutuel, lors d’une conférence au Parlement Européen devant les étudiants de Sciences Po Strasbourg ».

Les classiques distinguaient à juste titre les valeurs des vertus.
Les valeurs sont des normes établies conventionnellement par la Société pour faciliter le «vivre ensemble».
Les vertus sont du domaine de l’individu, ce qu’il estime devoir être juste de penser et de faire dans une situation donnée. Un citoyen peut être emprunt de valeurs (que n’entend-on nous pas aujourd’hui sur les fameuses «valeurs de la République») sans être pour autant vertueux. Il y a dans ces notions anciennes quelque chose de nos légalités et légitimités modernes.
Revenons à cette conférence au Parlement Européen qui a tout d’un poème. Le sujet de la conférence est à lui seul un exemple de la schizophrénie de nos dirigeants. Beaucoup de questions pour une si courte phrase : Une entreprise peut-elle avoir une éthique, et si oui, laquelle ?
En quoi le droit, de l’Union Européenne a fortiori, définit-il l’éthique des organisations ?
Qu’est ce que le droit vient faire avec l’éthique qui relève des vertus de chacun ?
Si cela était le cas, pourquoi une forme interrogative alors que le droit s’impose à tous ?
Les «inventeurs» de cette conférence ne doivent pas être dupes, puisqu’ils demandent à l’orateur «d’essayer d’y répondre»…
On aurait pu faire beaucoup plus simple, mais l’intervenant se serait-il prêté au jeu ? Les entreprises et plus particulièrement le Crédit Mutuel, respectent-ils le droit Européen ?
C’est sûr, cela aurait pu être embarrassant !! Parce qu’au final, avant de demander à Mr Théry de disserter avec Platon et Socrate, ce que nous attendions de ses prédécesseurs, et ce que nous attendons aujourd’hui de la justice, c’est qu’ils respectent et fassent respecter la loi.
Quoiqu’il en soit, ça n’était pas les sujets qui manquaient. Le Bavard nous en fait un petit résumé ici:

Après, de quoi parle t -on? Ou plutôt de quoi allons nous (tout faire pour) ne pas parler? Et enfin, qui parle ?
Mr Théry, digne successeur coopté du grand manitou du Crédit Mutuel Mr Lucas, pur produit d’un système qui ne brille guère (au regard des affaires en cours) par son éthique, mais pourquoi pas, il a droit aussi à la parole.
Les organisateurs se sont donné déjà tellement de mal pour formuler le thème du débat qu’ils ont courageusement choisi le format d’une conférence, laissant la parole au seul intervenant principal, sans contradicteur. Et ce qui était prévu est arrivé : vérités assénées à l’emporte pièce, raccourcis pour faibles d’esprit, leçons en veux-tu en voilà, quelques pures fake news confirmant une nouvelle fois que politique et chefs d’entreprises en sont les premiers divulgateurs.
On en vient pour finir à savoir: d’où parle t-on? Et là, nous n’avons pas fait économie de symboles…
Le lieu d’abord, le Parlement Européen, législateur supra-national, qui dit ce qui doit être fait et ce qui est moral pour toute l’Europe.
Quelle belle tribune pour un capitaine venant nous vanter que son armée agit par éthique !
Quelle belle tribune pour y dire naturellement ce qui est bien, pour y déposer une couronne de lauriers sur la tête du Sénateur ! Et enfin l’auditoire, des étudiants de Sciences Po futures élites de la Nation au service de l’éthique de l’Etat et des Entreprises, en un mot une belle mascarade où le Prince est assuré avant même d’avoir commencé, d’obtenir les louanges de ses sujets.
Pour qui a fait Sciences Po, quelle tristesse! Que sont devenus ce qui faisait la noblesse de son enseignement, le sens critique et la recherche des réalités cachées derrière les discours?
Nous avons envie de dire au Crédit Mutuel : « Arrêtez de vous ennuyer avec la gestion d’un empire de presse régionale, on vous fait de la publicité gratuite sans que vous ayez besoin de la demander… Alors Bolloré avec ses censures de reportages, il nous fait bien rire !! »

MM.

La justice par l’exemple

S’ouvre le procès en appel de Jérôme Cahuzac.
Médiapart, à l’origine et un des acteurs principaux de cette affaire, revient ici sur cette actualité.
L’enjeu principal semble être la confirmation ou non de la peine de prison de trois ans infligée en première instance. Nous ne reviendrons pas sur les détails de l’affaire, bien connue et largement documentée par Médiapart, si ce n’est pour rappeler quelques caractéristiques bien souvent communes à la plupart des affaires dénoncées.
Outre l’habituel « c’est celui qui dit qui est », on retrouve le plus souvent chez les personnes incriminées un sentiment d’impunité dont Fabrice Arfi se fait l’écho ce jour dans une interview donnée à Brut ici.

Ces deux éléments, confirmation d’une peine de prison ferme et sentiment d’impunité, sont loin d’être isolés l’un de l’autre, bien au contraire, il nous apparaît qu’il existe une corrélation forte.
Beaucoup de lanceurs et au premier chef parmi les fondateurs de MM. pourront attester que ce sentiment d’impunité est bien plus que partagé dans le monde politique et le monde des affaires, qu’ils constituent même l’un des paramètres de la réalisation d’opérations illégales.
Quel lanceur n’a pas entendu dire de la bouche de sa propre hiérarchie que de toute façon « on ne s’en prend jamais aux banques », (ou autre grosse entité), « nous sommes intouchables » ?
C’est bien parce que ce sentiment d’impunité fait partie intégrante à certains niveaux de hiérarchie, de l’exercice même du métier, c’est bien parce que ce sentiment d’impunité est intégré par les personnels en situation d’autorité ou de pouvoir, que la banalisation d’agissements contraires aux règles ou à la loi est devenue courante dans certains métiers. En un mot, « pourquoi se priver » quand on sait qu’il est intégré au sein de la profession et pire au sein des entités chargées de la contrôler, voire même de la justice, que la probabilité d’être poursuivi ou pire condamné pour agissements illicites est extrêmement faible. La hiérarchisation des entreprises joue également dans cette situation où l’on constate souvent que ceux qui sont à la manœuvre prennent soin de mêler ou d’exposer les hiérarchies en amont ou en aval pour s’assurer leur propre protection. Et tant qu’à faire dans l’illégalité, tout le monde a intégré le « plus c’est gros plus ça passe ».
Au-delà de cette constatation, il importe de comprendre que si ce sentiment semble si largement répandu au sein des organisations, c’est sans doute parce que la justice aurait échoué dans l’une de ses missions, à savoir l’exemplarité.
Il ne peut y avoir de justice sans peine, il ne peut y avoir de justice rendue au bénéfice de la collectivité si elle n’a pas pour fonction de montrer l’exemple.
Nous en revenons au cas de Monsieur Cahuzac. Même s’ils condamnent ses agissements, certains nous expliquent aujourd’hui qu’ils ne souhaitent à personne d’être condamné à une peine de prison ferme. Au-delà du fait que beaucoup de lanceurs vous diront qu’il peut y avoir des peines bien pires que celle de la prison, ce type de réflexion nous semble hors sujet car il faut bien voir que la peine ne sanctionne pas l’homme mais ses agissements dont il est à tout moment pleinement responsable.
Nous pensons au contraire que la justice serait bien éclairée à retrouver sa fonction d’éducation qui passe aussi par des peines conformes aux faits reprochés, évitant ainsi que se propage ce sentiment bien réel d’une justice à deux vitesses, celle des petits délits et celle des « cols blancs ».
Au-delà de ce constat et on l’aura compris, l’objectif est de refouler ce sentiment d’impunité et ce cercle vicieux où l’absence de peine exemplaire conduit à la reproduction d’actes délictueux qui eux-mêmes ne sont pas ou peu sanctionnés.
Il n’est pas inutile de rappeler comme le fait Fabrice ARFI dans l’interview, qu’il s’agit encore une fois d’une spécificité bien française, des cas similaires à l’affaire Cahuzac en France, pouvant être documentés dans des pays démocratiques comparables, donnant lieu le plus souvent à des condamnations fortes agrémentées de peines de prison fermes.
Ceci expliquant sans doute cela, le nombre d’affaires dans ces pays, est sensiblement inférieures…

MM.

Paradis fiscaux, un petit effort ?

Profitons de la publication par l’Association Tax Justice Network (TJN) de sa liste des paradis fiscaux (actualisée tous les deux ans) pour montrer, s’il en était encore besoin, la vacuité de celle récemment présentée par l’Union Européenne.

Là où l’Europe publie une liste des paradis fiscaux (si on peut l’appeler encore ainsi), basée sur des compromis politiques obscurs, celle de TJN prend en compte toute une batterie d’indices (à consulter ici), notamment le poids de chaque pays dans les flux financiers internationaux, lui permettant de déterminer en autre un indice d’opacité financière et surtout « a secrecy score » offrant une comparaison plus judicieuse entre les pays.

A ce titre, comme par magie, les grands oubliés de la liste européenne tels la Suisse, le Luxembourg ou le Panama, réapparaissent à des places très honorables !
Vous pouvez consulter la liste complète du Financial Secrecy Index 2018 de TJN ici.

Comme dans beaucoup d’autres domaines, ce type de classement ne vaut que par la méthodologie retenue, dépourvue de toutes considérations de nature politique.
Force est de constater que celle proposée (imposée) par le bon docteur Moscovici, au delà d’être totalement insuffisante au regard des critères retenus, fait avant tout l’objet, ce qui pour ainsi dire constitue sa seule méthodologie, d’arrangements politico-financiers qui lui enlèvent par conséquent, toute crédibilité.

D’un point de vue démocratique, il serait légitime que l’Europe confie l’établissement de ce type de liste à des organismes indépendants (tels TJN ou OXFAM aux résultats très proches et ce, via des méthodologies différentes), qui s’imposeraient à elle.

Suisse et Etats-Unis en tête : le vrai classement des paradis fiscaux

Au final rappelons que la lutte contre la fraude fiscale relève avant tout d’une volonté politique.
Lutter contre l’évasion fiscale c’est abattre les compromissions politiques et étatiques, mettre fin à de sombres arrangements passés avec la finance qui a pris le pouvoir sur le politique et le législatif.
Pour tous ceux ayant touché de près à la mécanique des flux financiers internationaux, inutile de mettre en oeuvre une armée de contrôleurs et de voter une myriade de textes de réciprocité, l’exemple Américain démontrant que lorsqu’il y a une réelle volonté politique, les caisses de l’Etat savent récupérer ce qui leur est dû.

MM.

Paradis fiscaux: une espèce en voie de disparition

C’était une liste noire déjà restreinte…
Le conseil des ministres des finances de l’Union européenne avait validé en décembre une liste noire de 17 pays, à la suite de plusieurs scandales d’évasion fiscale. À l’époque de la création de la liste noire européenne, des associations comme Oxfam ou Transparency International avaient critiqué l’initiative, regrettant qu’aucun pays européens ne figurent sur la liste, alors même que des États comme le Luxembourg ou l’Irlande proposent des largesses fiscales qui n’ont rien à envier à certaines paradis fiscaux. Ils avaient jugé que le choix des États à mettre ainsi à l’index était le fruit de compromis politiques qui avaient abouti à une liste trop restrictive.

A présent, cette liste l’est encore plus.
Les ministres des finances de l’Union européenne ont retiré huit pays de leur liste noire des paradis fiscaux:
Panama, la Corée du Sud, les Emirats arabes unis, la Tunisie, la Mongolie, Macao, les îles de la Grenade et la Barbade

Il reste donc: les Samoa, les Samoa américaines, l’île de Guam, Bahreïn, les îles Marshall, la Namibie, les Palaos, Sainte-Lucie et Trinité-et-Tobago…des confettis à l’autre bout du monde!

N’oublions pas, c’était en 2009.

Les gangsters de la finance – Documentaire

Un document ARTE disponible jusqu’au 10/02/2018

Reportage intégral: Les gangsters de la finance

Blanchiment, fraude fiscale, corruption, manipulation des cours… : depuis la crise de 2008, la banque HSBC est au coeur de tous les scandales. Cinq ans après leur film sur Goldman Sachs, Jérôme Fritel et Marc Roche passent au crible cet empire financier au-dessus des lois.
Créée à Hong Kong, il y a un siècle et demi, par des commerçants écossais liés au trafic d’opium, HSBC (Hongkong and Shanghai Banking Corporation) n’a cessé de prospérer en marge de toute régulation. Aujourd’hui, la banque britannique à l’ADN pirate incarne à elle seule les excès et les dérives de la finance internationale. Blanchiment de l’argent du crime – celui des cartels de la drogue mexicains et colombiens –, évasion fiscale massive, corruption ou manipulation du cours des devises et des taux d’intérêt : depuis la crise de 2008, ce géant a été mêlé à de nombreux scandales avec régularité et en toute impunité. Car l’opaque HSBC, experte en sociétés-écrans, dont les coffres débordent d’argent liquide déposé par ses clients discrets et douteux, est devenue « too big to jail », « trop grosse pour aller en prison ». La banque, riche de quelque 3 000 milliards de dollars, s’en tire chaque fois avec des amendes dérisoires. Trait d’union entre l’Orient et l’Occident, elle sert aussi désormais de pipeline pour les centaines de milliards d’euros de capitaux chinois partant à la conquête des marchés occidentaux : HSBC navigue aujourd’hui sous pavillon rouge.

Nouvelles menaces
Cinq ans après « Goldman Sachs »– La banque qui dirige le monde », Jérôme Fritel et Marc Roche plongent dans les arcanes d’un empire tentaculaire qui se cache derrière sa vitrine de banque de détail britannique. De Hong Kong aux États-Unis en passant par l’Europe, cette édifiante enquête révèle non seulement l’ampleur ahurissante des malversations commises par HSBC, mais éclaire aussi – avec une remarquable limpidité – les menaces qui se profilent sur la stabilité financière mondiale, dix ans après la crise des « subprimes ».

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